Introduction
La dépression est une pathologie importante chez la personne âgée de par sa fréquence et ses conséquences tant au niveau individuel que familial et sociétal. Or, elle reste un syndrome gériatrique souvent sous-diagnostiqué et sous-traité (1). Cet article résume les interventions de différents orateurs lors de la 20ème Journée de Gériatrie organisée par le service de Gériatrie du CHU UCL Namur le 21 mars 2017 à propos des spécificités cliniques de la dépression chez la personne âgée.
À l’échelle mondiale, un rapport de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) mentionne que la dépression toucherait 4.4% des personnes dans le monde quel que soit leur sexe ou leur âge, soit environ un total de 300 millions de personnes. La prévalence observée sur le continent européen se situe dans cette moyenne (2). Un effet de genre est observé, les femmes étant plus touchées que les hommes. La prévalence est plus importante chez la femme que chez l’homme. La prévalence augmente progressivement avec l’âge pour atteindre un pic vers l’âge de 60-64 ans au moment du passage à la retraite, avant de décroitre légèrement (3). Toutefois, dans ce rapport, pour les tranches d’âge les plus élevées, les données regroupent sans distinction des tranches d’âge très différentes comme, par exemple, le regroupement des 65 à 70 ans et les 80 à 85 ans qui vivent pourtant des réalités bien différentes de par leur niveau de fragilité et leur état fonctionnel. En Belgique, la prévalence de la dépression est de 15 % (tout âge confondu) et atteint 19 % pour les personnes âgées de 75 ans ou plus (4). Les femmes y présentent également davantage de troubles dépressifs que les hommes. Les taux observés dans ces différents rapports sont à nuancer et peuvent être influencés par de nombreux déterminants de la santé mentale dont des éléments individuels (par exemple, le niveau de scolarité), culturels, économiques (par exemple, le revenu moyen), les politiques nationales, des facteurs environnementaux et/ou sociaux (par exemple, le taux de chômage). Nous ne les développerons pas dans cet article. L’enquête de santé de l’Institut Scientifique de Santé Publique paru en 2013 identifie, par exemple, un lien inverse clair entre le niveau de scolarité et la prévalence de la maladie.
L’impact de la dépression peut être évalué en utilisant différents critères et en particulier le niveau d’incapacité qu’elle engendre. L’outil YLD (Years Lost due to Disability) de l’OMS mesure le nombre d’années perdues liées à une incapacité. En Europe, la dépression est responsable de 5.6 % des YLD (tout âge confondu) et de 3.2 % au-delà de 70 ans. L’impact relatif des autres pathologies (cardiovasculaires, oncologiques, …) explique certainement en partie cette réduction relative après 70 ans. Une autre conséquence de la dépression peut être évaluée par l’incidence du suicide. En Belgique, il était en 2012 de 14/100 000 habitants ce qui place notre pays en tête de tous nos voisins européens (5). L’incidence du suicide est près de trois fois supérieure chez l’homme comparé à la femme. Le taux de suicide réussi augmente avec l’âge, en particulier chez les hommes. Après un premier pic autour de 30 ans, la mortalité par suicide augmente à nouveau après 65 ans. Le suicide occupe la neuvième place dans les causes de décès entre 65 et 84 ans alors qu’il occupe la seconde place pour les 15-24 ans (6).
En Belgique, une personne âgée de plus de 75 ans sur 4 consomme un antidépresseur et le nombre de doses quotidiennes délivrées est supérieur à la moyenne européenne (66.7 Defined Daily Dose/1000 personne par jour versus 61.3) (7). Cette consommation est même plus importante en Wallonie que dans les deux autres régions et augmente au fil des années à l’image des principaux pays européens (8). Chez les patients de plus de 75 ans, la consommation de tranquillisants ou somnifères est étonnamment plus élevée que celle des antidépresseurs (35 % versus 12.5 %) qui est elle-même plus élevée que le soutien psychothérapeutique (7.5 %) alors que les recommandations de bonne pratique mettent en garde quant aux effets indésirables médicamenteux plus fréquents (9). L’impact financier est potentiellement important. Par exemple, la duloxetine occupait en 2015 la dixième place des médicaments situés dans le top 10 du coût le plus élevé des médicaments remboursés en Belgique, comme certains inhibiteurs de la pompe à proton (8).
Suite à ces différents éléments, nous souhaitons sensibiliser le lecteur aux différentes formes possibles de présentation clinique de la dépression de la personne âgée en l’aidant à distinguer les symptômes d’autres questions liées au vieillissement, tout en encourageant le recours à des traitements non-pharmacologiques. L’approche médicamenteuse dans ses aspects spécifiques à la personne âgée n’est donc pas abordée.
Les présentations cliniques de la dépression de la personne âgée
Les critères diagnostiques conventionnels de la dépression de la personne âgée sont identiques au sujet jeune, mais ce sont surtout l’atypie et le caractère polymorphe des présentations qui doivent attirer l’attention du clinicien. Le projet COME-ON (10) a encore récemment mis en évidence que la dépression reste méconnue et difficilement appréhendée par les soignants de première ligne en maison de repos et de soins. Les questions et pertes liées au vieillissement (les deuils par exemple), l’exposition à la polymédication, la présence de multiples comorbidités peuvent brouiller les pistes. Par exemple, et de manière imagée, une personne âgée qui pleure ne souffre pas nécessairement de dépression et le fait qu’elle puisse rire n’exclut pas ce diagnostic.
D’après le DSM IV (11) ou V (12), la dépression majeure se définit par la présence d’au moins 5 symptômes parmi les 9 suivants : une humeur dépressive (tristesse, pessimisme permanent, morosité), une aboulie ou anhédonie (perte d’intérêt ou de plaisir), une perte ou un gain de poids significatif avec perte d’appétit, une insomnie ou hypersomnie (typiquement le réveil précoce et non le trouble de l’endormissement), une agitation ou un ralentissement psychomoteur, un sentiment de fatigue (spécifiquement majoré le matin, s’améliorant en cours de journée), un sentiment de dévalorisation ou de culpabilité, une indécision ou une diminution de la capacité de concentration et la présence de pensées morbides récurrentes (que les idéations soient passives, actives non scénarisées, actives scénarisées confiées ou non). De plus, ces symptômes ne doivent pas répondre aux critères d’épisodes mixtes (troubles bipolaires). Ils doivent induire une souffrance ou une altération du fonctionnement. D’autres symptômes peuvent être associés sans être indispensables au diagnostic : idées de ruine, isolement, somatisation, agressivité, sentiment d’incurabilité, baisse de libido.
La dépression mineure correspond à la présence de 3 ou 4 de ces critères durant une période supérieure à 2 semaines alors que la dysthymie correspond à la présence de 2 symptômes parmi les 9 évoqués plus haut pendant une durée de deux ans ou plus.
Le trouble dépressif majeur est la forme qui altère le plus le pronostic fonctionnel et vital, mais la dépression mineure est la forme la plus fréquente chez le sujet âgé, principalement en institution.
De manière concrète, l’échelle Geriatric Depression Scale ou GDS a été développée pour améliorer le dépistage du syndrome. Sa forme initiale comporte 30 items (13), mais des versions courtes de 4 à 15 items ont également été proposées. Son usage, sa pertinence et son impact sur le patient restent encore beaucoup discutés.
Chez la personne âgée, c’est le caractère polymorphe de la présentation de la dépression qui pose des difficultés diagnostiques (Tableau 1).
Voici quelques formes stéréotypées de dépression, sachant que leurs différentes caractéristiques peuvent se recouper.
La dépression mélancolique inclut une douleur morale insupportable, une prostration et un mutisme pouvant évoquer un syndrome de glissement. Elle est souvent accompagnée d’un état d’opposition massive (comportement régressif, refus alimentaire absolu) ou au contraire d’une agitation et de troubles du comportement. Elle entre souvent dans le cadre de troubles bipolaires (syndrome maniaco-dépressif) et impose une hospitalisation en urgence du fait du retentissement somatique rapide et du risque suicidaire majeur (vingt fois plus élevé que dans la forme classique).
La dépression hypochondriaque est dominée par l’expression d’un mal-être physique : fatigue, douleurs tenaces, rebelles, diffuses, constipation, anorexie. Le patient est inquiet, revendicateur, polarisé sur lui-même et multiplie les consultations médicales par insatisfaction vis-à-vis des examens réalisés et des traitements prescrits. À l’extrême et rejoignant la forme mélancolique, le patient peut présenter un syndrome de Cotard qui correspond à un délire de négation d’organe (description de parties du corps ayant disparu ou pourri). Il rejoint la forme de dépression délirante.
Les dépressions délirantes sont délicates car les symptômes dépressifs sont masqués par les troubles délirants. Ces derniers sont souvent congruents à l’humeur et peuvent être de différents types : délire d’incurabilité, délire de ruine, délire d’auto-accusation, délire persécutif (vol ou empoisonnement), délire de jalousie, ... Dans ces situations, le patient ne présente pas toujours d’antécédent pouvant faire évoquer une pathologie psychotique.
Dans les dépressions pseudo démentielles, les troubles cognitifs sont au premier plan et sont améliorés par le traitement antidépresseur. L’évolution tardive est toutefois marquée par la survenue fréquente d’une démence authentique justifiant le suivi régulier de ces patients. À l’inverse, des symptômes dépressifs peuvent parfois survenir dans un contexte de troubles cognitifs. L’échelle de Cornell a été élaborée afin de faciliter le dépistage de la dépression chez des personnes dont le syndrome démentiel est déjà installé (14).
Les dépressions hostiles sont dominées par des troubles du comportement avec hétéro - et auto-agressivité, violence verbale, violence physique, négligence, comportements passifs agressifs, harcèlement. En pratique, des changements importants et récents du comportement doivent faire évoquer le diagnostic de dépression. Les complications les plus fréquentes de cette forme sont l’éloignement ou la maltraitance familiale ou institutionnelle, notamment par le biais de la sédation et de la contention physique.
Dans la dépression anxieuse, le tableau anxieux est prédominant. Un évènement déclenchant est fréquemment à la base d’accès itératifs d’angoisse, d’inquiétude permanente, souvent à la base d’une inhibition avec dépendance vis-à-vis de l’entourage et associé à des surconsommations (alcool, benzodiazépine). En pratique, la survenue de symptômes anxieux chez une personne qui n’a jamais été anxieuse doit alerter le clinicien et faire évoquer ce diagnostic.
La dépression conative est centrée sur la démotivation et engendre un désengagement affectif et relationnel, une négligence, une apathie et un tableau de dépendance croissante.
Une mise au point anamnestique et clinique exhaustive s’impose dans tous les cas car les troubles dépressifs peuvent être secondaires à une pathologie organique (maladie de Parkinson, cancer, dysthyroïdie, carence vitaminique, …) ou à des médications (corticoïdes, neuroleptiques, opioïdes, antiarythmiques, …). Signalons que malheureusement, il n’est parfois pas possible de repérer formellement ou d’éliminer le facteur déclenchant.
La consommation régulière d’alcool masque quant à elle le syndrome dépressif. S’il ne faut pas confondre la labilité émotionnelle du consommateur régulier avec une dépression, une consommation compulsive avec phases aigues d’intoxication doit faire évoquer un syndrome dépressif. Il est nécessaire d’attendre au moins deux semaines de sevrage pour évaluer la persistance des signes et pouvoir poser le diagnostic de dépression. La pharmacocinétique des antidépresseurs étant modifiée par une consommation régulière d’alcool, ces médicaments devraient donc être évités et le cas échéant, prescrits de façon précautionneuse dans cette situation.
Le deuil est également une situation dans laquelle poser un diagnostic de dépression est délicat. Notion introduite par Sigmund Freud, le deuil comprend l’ensemble des réactions physiques, psychologiques, affectives et comportementales consécutives à toute perte significative, qu’il s’agisse d’un être humain ou non. Il existe une controverse actuellement quant aux limites temporelles ou critères permettant de distinguer une réaction physiologique à la perte d’un être ou d’un objet cher, éventuellement longue et intense, d’un deuil pathologique. Il convient de prendre en compte les facteurs culturels, sociaux et confessionnels de la personne endeuillée ainsi que les circonstances de la perte et les liens qui unissaient la personne endeuillée et la personne disparue. Toutefois, un envahissement de toute la sphère psychique du sujet avec un retentissement sur son fonctionnement doit être un signe d’alarme. La classification du deuil pathologique dans les troubles dépressifs ou dans les troubles de l’adaptation est un élément qui reste débattu.
Enjeux existentiels au grand-âge ou dépression ?
Des signes tels qu’un sentiment d’indignité, d’insuffisance, des troubles mnésiques allégués, le développement d’une dépendance, des angoisses de mort et de solitude peuvent constituer des indices de la dépression du sujet âgé.
Toutefois, ces mêmes signes peuvent faire partie d’un cheminement propre au grand âge.
Les personnes âgées, ou très âgées (que l’on pourrait définir comme ayant dépassé son espérance de vie à la naissance, soit 84 ans pour la femme et 79 pour l’homme), peuvent être confrontées à de multiples stéréotypes. Elles se retrouvent affublées (parfois par eux-mêmes) d’appellations plus ou moins bienveillantes : « l’oublié de Dieu et des hommes, le vétéran, le fossile, le survivant, le rescapé, le collector, le vestige ».
Être âgé c’est faire doublement l’expérience de la solitude. D’une part, c’est être sans compagnie, isolé, et d’autre part c’est être unique, témoin d’un passé parfois lointain. Tous les patients très âgés sont traversés par cette interrogation essentielle : « Pourquoi ou Pour Quoi suis-je encore en vie ? ». Il existe deux manières d’y répondre. La première renvoie aux origines ou aux causes en répondant au pourquoi. Les réponses suivantes sont donc possibles : vous aviez une bonne hygiène de vie, vous vivez dans un lieu adapté avec des soins appropriés, vous avez un bon patrimoine génétique. La seconde réponse renvoie à la finalité, à une projection vers le futur : quel sens mettre dans cette vie ? C’est le temps du récit ultime qui permet d’organiser la pensée de la mort. Il apparait ici des temporalités différentes qui peuvent entrer en tension. Les personnes âgées sont en quelque sorte « des arpenteurs du temps » car elles ont simultanément tous les âges, actuels et précédents, et les traversent constamment afin de s’organiser progressivement et aborder leur dernier chantier, celui de leur mort. Elles ont aussi un rapport au temps différent du nôtre, soignants, car il est libéré de la contrainte qui marque notre activité professionnelle. Elles peuvent revisiter toutes les périodes de leur vie (« temps circulaire ») et voyager à leur rythme à l’intérieur d’elles-mêmes (« temps dilaté »). Afin que le fruit de ces voyages soit digne de témoignage, il faut un témoin, un récipiendaire qui soit à l’écoute. N’oublions donc pas ces personnes du grand âge que nous stigmatisons d’oublier tout. N’oublions pas de les écouter !
Notre positionnement en tant que soignant ou que proche peut également influencer la santé mentale de nos aînés. À ce niveau le défi est de maintenir, d’encourager la personne âgée comme un sujet autonome, producteur et propriétaire de ses désirs et non d’en faire un objet de soins, dépendant, pour lequel les autres décident. À titre d’exemple, la terminologie utilisée pour le choix d’un lieu de vie peut être révélatrice. Un « maintien au domicile ou un placement en maison de repos » suppose un objet de soin passif. A contrario, le « soutien à domicile ou l’accueil en maison de repos » sous-entend un sujet autonome et décideur.
Toutes ces questions sont donc inhérentes aux transitions à travers les âges et doivent être différenciées de l’état dépressif en y intégrant une vision globale de la personne, des facteurs contextuels dans lesquels elle évolue et du positionnement pris par l’entourage familial ou les soignants.
Exemples d’aides non médicamenteuses
Les syndromes dépressifs sont la plupart du temps réversibles. Ils nécessitent, surtout dans les formes majeures, une prescription médicamenteuse qui tienne compte des particularités pharmacodynamiques liées au vieillissement conjuguée à une approche psychothérapeutique. Si le soutien psychosocial, qu’il soit familial, de proches ou intergénérationnel, est un des éléments de soutien de la personne âgée, une série d’autres approches non médicamenteuses ont fait leur preuve dans le traitement de la dépression de la personne âgée dont la psychothérapie conventionnelle, la thérapie interpersonnelle, la thérapie cognitive et comportementale, la thérapie de résolution de problèmes, les séances d’exercices seuls ou combinés, … (15-18). Plus récemment d’autres courants ont testé la place de la luminothérapie, la musicothérapie, la naturopathie ou même des approches incluant l’animal de compagnie (19). Nous abordons ici, sans être exhaustif, quelques approches thérapeutiques non pharmacologiques innovantes abordées dans le cadre du colloque.
Les ruminations mentales sont un phénomène clé dans la dépression. Il s’agit de toutes ces pensées qui nous occupent la tête (regrets d’hier et craintes de demain) et nous empêchent de profiter de l’instant présent. Elles sont favorisées par un mode de pensée abstrait, évaluatif, analytique, qui cherche les causes et les conséquences d’une expérience. Ce mode est habituellement contrebalancé par un mode concret, expérientiel, qui cherche les moyens d’action et les solutions possibles et est centré sur le présent. Ce dernier mode est dépendant de nos capacités cognitives et en particulier de nos fonctions exécutives, permettant de mettre en place des comportements adaptés par la planification de ceux-ci, la recherche en mémoire, la génération de solutions et l’inhibition d’actions non pertinentes ou de comportements jugés mal adaptés. On peut dès lors comprendre que l’altération d’au moins l’une de ces fonctions favorise et entretient les affects dépressifs. La compréhension par le patient et son entourage de ces mécanismes (dans le cadre des pathologies neuro-cognitives notamment) sera donc un point essentiel pour permettre l’adaptation évoquée plus haut et donner les moyens de compenser la fonction cognitive endommagée. Plus concrètement des techniques d’aides avec le patient comme la génération d’idées (solutions, idées de choses à faire, actions à initier, etc.) lui permettront de sortir du cercle vicieux des ruminations. En outre, les techniques de pleine conscience ont fait leurs preuves quant aux effets bénéfiques de la capacité à se centrer sur l’instant présent (focalisation sur la tâche en cours versus sur des distracteurs et/ou interférences internes comme des ruminations).
Une autre facette capitale de la dépression est la désactivation comportementale qui est également un symptôme clé de l’apathie rencontrée chez les patients cérébro-lésés (tant dans les troubles focaux comme les AVC et traumatismes crâniens que dans les maladies neuro-dégénératives telles la maladie de Parkinson, par exemple) (16). On touche à la dimension motivationnelle et aussi émotionnelle des perturbations des fonctions exécutives. La mise en évidence de ce qui fait sens pour le patient (ré-envisager la motivation en fonction des ressources cognitives disponibles), ce qui le valorise sera un point clé dans la prise en charge de ce symptôme qui ne pourra pas faire l’objet de prise en charge identique à celle du jeune adulte.
Enfin, la littérature tend à démontrer un effet bénéfique de l’activité physique sur le fonctionnement exécutif et donc sur les capacités à adapter ses comportements. Les preuves d’efficacité restent difficiles à rassembler (20, 21). L’activité physique mérite une attention certaine chez la personne âgée tant dans un objectif de prévention que d’accompagnement dans le cadre de troubles cognitifs déjà établis ou de modalité thérapeutique (22).
Conclusion
Le diagnostic de dépression est délicat chez la personne âgée en raison de sa présentation polymorphe et des nombreux facteurs interférants. Toutefois, il est dangereux ou risqué de la réduire à un diagnostic d’exclusion pour deux raisons : elle peut coexister avec une pathologie organique (dépression secondaire), inflammatoire ou cancéreuse par exemple, dont l’existence n’est donc pas exclusive. Ensuite, c’est prendre le risque d’un retard de prise en charge alors qu’il s’agit d’une affection curable dans la plupart des cas, même au grand âge, et que son retentissement sur la qualité de vie du patient et de ses proches est majeur. Face aux plaintes de nos aînés, il nous appartient d’abord de cultiver les moments précieux durant lesquels nous sommes à l’écoute et bienveillants. Ensuite, certaines techniques cognitives permettront de contrer les ruminations mentales et la désactivation comportementale, deux facettes-clés de la dépression. Enfin l’exercice physique est à promouvoir tant pour ses bénéfices somatiques que fonctionnels et exécutifs. Il existe donc plusieurs pistes pour rendre élan vital et énergie aux patients âgés avant de penser qu’il n’y a plus rien à faire comme ils nous le disent parfois eux-mêmes.
Affiliations
Service de Médecine Gériatrique, CHU UCL Namur, Yvoir ; Institut recherche santé et société, UCLouvain
Psychological Sciences Research Institute, UCLouvain
Psychologue spécialisé dans l’accompagnement des personnes âgées
Correspondance
Dr. François-Xavier Sibille
CHU UCL Namur – site Godinne
Service de Médecine Gériatrique
Avenue Gaston Thérasse, 1
B-5530 Yvoir
E-mail : francois-xavier.sibille@uclouvain.be
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