L’année 2019 fut riche en nouveautés et découvertes dans le département de recherche du service de Gynécologie. L’amélioration des techniques de préservation de la fertilité des patientes devant recourir à des traitements gonadotoxiques est notre cheval de bataille. Pour ces patientes, différentes options de préservation de la fertilité peuvent être proposées avant un traitement par chimio- et/ou radiothérapie avec notamment la cryopréservation d’ovocytes et/ou d’embryons, et la cryopréservation de tissu ovarien (Figure 1).
La cryopréservation de tissu ovarien a attiré l’attention de nombreux scientifiques ces derniers temps, avec plus de 130 naissances vivantes décrites chez l’Homme dans le monde entier (1). Ce n’est qu’en décembre 2019 que cette technique a été reconnue par l’American Society for Reproductive Medicine (ASRM) comme n’étant plus expérimentale (2). Cependant, un des inconvénients majeurs de cette procédure est qu’elle nécessite une greffe avasculaire du tissu ovarien cryopréservé-décongelé, exposant le tissu greffé à une période d’ischémie d’environ une semaine, le temps de la néo-angiogenèse, et entraînant la perte de nombreux follicules. Il existe deux mécanismes à l’origine de la perte folliculaire massive observée après la transplantation de tissu ovarien cryopréservé : (1) l’activation folliculaire (aussi appelée burnout folliculaire) et (2) l’atrésie folliculaire, directement liée à l’ischémie.
Dans le courant de l’année 2019, nous avons mis en évidence les voies de signalisation impliquées dans le burnout folliculaire. Il s’agit des voies de signalisations PI3K-Akt et Hippo, toutes deux responsables d’une activation folliculaire excessive (3,4).
Afin de limiter cette perte folliculaire liée à la fenêtre ischémique lors de la transplantation du tissu, nous avons mis au point une technique permettant de stimuler la néo-angiogenèse au niveau du site de greffe en utilisant des cellules souches dérivées de tissu adipeux. En quelques mots, nous préparons le site de greffe en y apposant des cellules souches dérivées de tissu adipeux deux semaines avant la transplantation du tissu ovarien. Ces cellules ont la propriété de synthétiser différents facteurs de croissance permettant la stimulation de la vascularisation du site de greffe. Cette technique de transplantation en deux temps permet de raccourcir la fenêtre ischémique et donc de préserver un plus grand nombre de follicules, permettant ainsi d’allonger la durée de vie des greffons (5,6).
L’équipe de recherche développe également l’ovaire artificiel. En effet, pour les patientes atteintes d’un cancer ayant un tropisme métastatique pour l’ovaire ou pour les patientes atteintes d’un cancer hématologique, la transplantation de tissu ovarien représente un risque de réimplantation de cellules malignes éventuellement présentes dans celui-ci (7). L’idée est d’isoler les follicules ovariens de leur stroma environnant et de les incorporer dans une matrice biocompatible pour la transplantation. En cette année 2019, notre laboratoire a fait de belles avancées en matière de protéomique dans le but de permettre la conception d’une matrice répondant à tous les critères requis pour soutenir la quiescence ainsi que la croissance folliculaire (8).
L’espoir d’améliorer les chances de devenir maman pour les patientes guéries d’un cancer représente une motivation énorme pour tous nos chercheurs.
Affiliations
1. Université Catholique de Louvain, Pôle de Recherche en Gynécologie, Institut de Recherche Expérimentale et Clinique, Bruxelles
2. Cliniques universitaires Saint-Luc, Service de Gynécologie, Bruxelles
Correspondance
Pr. Marie-Madeleine Dolmans
Université catholique de Louvain, Pôle de Recherche en Gynécologie, Institut de Recherche Expérimentale et Clinique
Cliniques universitaires Saint-Luc
Service de Gynécologie
Avenue Hippocrate 10
B-1200 Bruxelles
marie-madeleine.dolmans@uclouvain.be
Références
- Donnez J, Dolmans MM. Fertility preservation in women. N Engl J Med. 2017;377(17):1657-1665.
- Practice Committee of the American Society for Reproductive Medicine. Fertility preservation in patients undergoing gonadotoxic therapy or gonadectomy: a committee opinion (2019). Fertil Steril. 2019;112(6):1022-1033.
- Masciangelo R, Hossay C, Donnez J, Dolmans MM. Does the Akt pathway play a role in follicle activation after grafting of human ovarian tissue? Reprod BioMed Online. 2019a;39(2):196-198.
- Masciangelo R, Hossay C, Chiti MC, Manavella DD, Amorim CA, Donnez J, Dolmans MM. Role of the PI3K and Hippo pathways in follicle activation after grafting of human ovarian tissue. J Assist Reprod Genet. 2019b. https://doi.org/10.1007/s10815-019-01628-1
- Cacciottola L, Manavella DD, Amorim CA, Donnez J, Dolmans MM. In vivo characterization of metabolic activity and oxidative stress in grafted human ovarian tissue using microdialysis. Fertil Steril. 2018;110(3):534-544.
- Manavella DD, Cacciottola L, Payen VL, Amorim CA, Donnez J, Dolmans MM. Adipose tissue-derived stem cells boost vascularization in grafted ovarian tissue by growth factor secretion and differentiation into endothelial cell lineages. Mol Hum Reprod. 2019;25(4):184–193.
- Dolmans MM and Amorim CA. Construction and use of artificial ovaries. Reprod. 2019;158(5):F15-F25.
- Ouni E, Vertommen D, Chiti MC, Dolmans MM, Amorim CA. A Draft Map of the Human Ovarian Proteome for Tissue Engineering and Clinical Applications. Mol Cell Proteomics. 2019;18(Suppl 1):S159-S173.