Les SGLT-2 inhibiteurs sont-ils une approche thérapeutique holistique du diabète de type 2 ? Le point après l’essai EMPA-REG OUTCOME

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Martin Buysschaert Publié dans la revue de : Mai 2017 Rubrique(s) : Diabétologie
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Résumé de l'article :

Les inhibiteurs des transporteurs SGLT-2 (gliflozines) sont une nouvelle classe de médicaments glucorétiques qui amènent en parallèle d’une réduction de l’hémoglobine glycatée, une perte pondérale et une amélioration de la tension artérielle chez des patients diabétiques de type 2. L’empagliflozine (Jardiance®) a fait l’objet d’études structurées le confirmant. EMPA-REG OUTCOME, un essai international récemment publié, vient en outre de mettre en évidence un bénéfice cardiovasculaire et rénal majeur sous empagliflozine chez des patients diabétiques de type 2 à haut risque cardiovasculaire. Jardiance® réduit en effet les risques de mortalité totale et, plus spécifiquement, de mortalité cardiovasculaire, respectivement de 32% et 38% par rapport au placebo, et celui d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque de 35%. Le risque de survenue ou d’aggravation d’une néphropathie chez ces malades est également diminué de 39%.

Le but de cet article est de proposer un état des lieux et d’intégrer les données scientifiques qui concernent Jardiance® en pratique clinique.

Mots-clés

Diabète de type 2, empagliflozine, complications cardiovasculaires, néphropathie, traitement

Que savons-nous à ce propos ?

Les SGLT-2 inhibiteurs (ou gliflozines) sont une nouvelle classe thérapeutique efficace dans le traitement du diabète de type 2. L’étude EMPA-REG OUTCOME a démontré, en outre, un bénéfice cardiovasculaire important chez des diabétiques de type 2 à risque traités par empagliflozine vs. un placebo.

Que nous apporte cet article ?

L’article confirme l’intérêt et la place de l’empagliflozine dans l’algorithme thérapeutique moderne du diabétique de type 2, sachant aussi son bénéfice cardiovasculaire et, comme plus récemment rapporté, un effet de néphroprotection.

Article complet :

INTRODUCTION

C’est un fait validé par la communauté scientifique internationale: le diabète sucré en 2017 est un problème – un défi – de santé publique à l’échelle du monde. Pour deux raisons principales: il y a d’abord son augmentation de prévalence selon un mode pandémique; il y a ensuite le génie malin de la maladie à développer, potentiellement, à long terme, un ensemble de « complications » neurologiques ou vasculaires invalidantes.

Le premier constat est donc celui de la pandémie. Il y avait, en 2015, 415 millions de diabétiques dans le monde (soit 8.8 % de la population) et les projections de l’International Diabetes Federation (IDF) indiquent qu’ils seront 640 millions (10.4 %) dans 25 ans (1,2). Il s’agit essentiellement de diabètes de type 2 qui représentent plus de 80% de l’ensemble des diabètes. À ces chiffres vertigineux, il convient encore d’ajouter plus de 300 millions de personnes « prédiabétiques » qui seront près de 500 millions en 2040. Cette croissance concerne principalement les pays émergents et, en leur sein de manière plus ciblée, les populations à faibles revenus. L’Europe n’est cependant pas à l’abri avec aujourd’hui 60 et demain (2040) 70 millions de sujets atteints. En Belgique, dans le groupe d’âge [20-79 ans], l’IDF identifie plus de 540 000 cas, soit 6.7 % de notre population, et encore autant de personnes prédiabétiques.

Le second constat – qui fait logiquement suite au premier – est celui des dégâts « collatéraux » du diabète (« complications ») qui peuvent se développer après quelques années d’insuffisance thérapeutique et de médiocrité glycémique. Il s’agit d’une part de lésions neurologiques ou microvasculaires abîmant les yeux, et chez près de 35 % des diabétiques de type 2, les reins (3). Il y a d’autre part les complications cardiovasculaires mortifères qui sont deux à quatre fois plus fréquentes chez le diabétique que chez la personne non diabétique. Il s’agit essentiellement de maladies coronariennes, d’insuffisance cardiaque, d’accidents vasculaires cérébraux et/ou d’artérite périphérique (3).

Le rôle « toxique » de l’hyperglycémie chronique dans la genèse de ces lésions est démontré entre autres par les études d’intensification thérapeutique et d’optimisation glycémique qui mettent en évidence, tant dans les diabètes de type 1 que de type 2, une réduction du risque de complications micro – et macrovasculaires – par rapport aux traitements conventionnels (3-5). L’essai « contradictoire » ACCORD qui concerne principalement la macroangiopathie, lorsqu’il est « déconstruit » sur le plan génétique, indique également un « gain » cardiovasculaire dans un sous-groupe de diabétiques de type 2 qui ne sont porteurs d’aucune mutation d’allèles (6). Cela étant, il est aujourd’hui reconnu que l’étiologie de la macroangiopathie est plurielle et que les facteurs de risque cardiovasculaires conventionnels (obésité, hypertension artérielle, dyslipidémie et/ou tabac) l’amplifient – et doivent donc être parfaitement maitrisés pour éviter le développement de cette complication (7).

Eu égard à l’ensemble de ces observations, l’excellence glycémique reste donc à ce jour un objectif dominant. Une palette de médicaments efficaces permet aujourd’hui d’y tendre. Toutefois, dans le contexte des complications rénales et cardiovasculaires, il y aurait cependant – raisonnablement – une plus-value pour les médicaments qui, à côté de leur « simple » effet hypoglycémiant, démontreraient un bénéfice « direct » sur l’évolution de la néphropathie et/ou de la macroangiopathie. C’est dans ce contexte qu’il faut situer l’étude EMPA-REG OUTCOME (8). Elle met en effet en évidence le fait que l’empagliflozine (Jardiance®) est associée, à côté de son effet hypoglycémiant déjà reconnu, à un tel bénéfice cardiovasculaire et rénal chez des diabétiques de type 2 à risque (9,10).

Le but de cet article est dès lors de proposer un état des lieux en 2017 sur les SGLT-2 (pour Sodium-Glucose Cotransporter-2) inhibiteurs (gliflozines), en particulier sur l’empagliflozine, et de cibler les données EMPA-REG OUTCOME pour les intégrer en pratique dans une prise en charge moderne – phénotypée – du patient diabétique de type 2.

SGLT-2 INHIBITEURS : DÉFINITION ET RÉSUMÉ DES MODES D’ACTION

Les SGLT-2 inhibiteurs sont une classe de médications orales qui inhibent les transporteurs SGLT-2 au niveau du rein, et en conséquence, la réabsorption tubulaire du glucose. En d’autres termes, ils réduisent le seuil rénal et favorisent ainsi une excrétion accrue de glucose dans les urines (de l’ordre de 70 à 80 g/j) avec, en conséquence, une réduction de la glycémie plasmatique. Cet effet « glucorétique » est associé à une perte calorique d’environ 280 à 320 kcal/j (4 kcal par gramme de glucose « uriné »). Par leur mode d’action, les gliflozines provoquent également une natriurie qui diminue la charge hydrosodée de l’organisme avec comme dividende supplémentaire une réduction de la tension artérielle (11). Ces différents bénéfices cliniques (sur la glycémie, le poids et la tension artérielle) ont été rapportés pour l’empagliflozine par un ensemble d’études structurées, randomisées et contrôlées, dont une synthèse a été publiée par Buysschaert en 2015 (12).

En résumé, Jardiance®, administré à la dose de 10 et 25 mg chez les diabétiques de type 2, seul ou combiné à d’autres médicaments hypoglycémiants, y compris l’insuline, est associé, à moyen et long terme, à une réduction de l’ordre de 0,7 à 0,9 % de l’hémoglobine glycatée (HbA1c) et à une diminution significative des glycémies à jeun et/ou nycthémérales par rapport au placebo, sans augmentation du risque d’hypoglycémie. En parallèle, une perte pondérale, d’environ 2.0 à 2.5 kg, est aussi objectivée vs. le placebo ou certains comparateurs actifs (sitagliptine, glimépiride), y compris chez les diabétiques de type 2 insulino-traités. Ces résultats sont également couplés à une diminution des tensions artérielles systolique et diastolique (12). Les effets secondaires des gliflozines sont habituellement limités à une augmentation, dans certaines études, des infections urinaires et surtout génitales, en particulier chez la femme (12). Quelques cas d’acidocétose euglycémique ont été rapportés a priori chez des patients très insulinodéficients (13).

ÉTUDE EMPA-REG OUTCOME : RÉSUMÉ DU DESIGN ET DES OBJECTIFS (8)

L’objectif principal de cet essai international était d’évaluer, dans une cohorte de personnes diabétiques de type 2 à très haut risque cardiovasculaire, la sécurité cardiovasculaire (non infériorité ou supériorité statistique) de l’empagliflozine par rapport à un placebo. Le critère pluriel d’évaluation primaire comportait la survenue de décès cardiovasculaires, d’un infarctus myocardique non fatal ou d’un accident vasculaire cérébral (AVC) non mortel (3P-MACE pour Three Points-Major Adverse Cardiovascular Events). Les critères d’évaluation secondaire prédéfinis étaient principalement tous les événements cardiovasculaires considérés individuellement ainsi que l’évolution de la microangiopathie, en particulier rénale. 7020 patients ont été inclus dans l’étude dont la durée médiane a été de 3,1 années. Une description exhaustive de leurs caractéristiques cliniques a été publiée dans Louvain Médical (14). Il est cependant important de rappeler qu’un risque cardiovasculaire élevé était un critère absolu d’inclusion. Plus spécifiquement sur le plan rénal, 17,8 % des patients avaient à l’inclusion une filtration glomérulaire (eGFR pour estimated Glomerular Filtration Rate) à 45-49 ml/min/1.73 m2 et 7,7 % une valeur entre 30 et 44 ml/min/1.73 m2. Dans le cadre d’un suivi rénal, les patients ont d’ailleurs été subdivisés en deux groupes, l’un caractérisé par une eGFR ≤ 59 ml/min/1.73 m2 et l’autre ≥ 60 ml/min/1.73 m2. Il n’y avait aucune différence clinique significative entre ces deux groupes. Par ailleurs, une microalbuminurie ou une macroprotéinurie étaient retrouvées respectivement chez 26,7 % et 16 % des sujets inclus.

L’empagliflozine aux doses de 10 ou 25 mg a été administrée aux malades pendant toute la durée de l’étude, en ajout aux traitements hypoglycémiants antérieurs (y compris l’insuline), qui devaient cependant être « renforcés » si nécessaire en cours d’étude dans les groupes empagliflozine et placebo pour obtenir le meilleur contrôle glycémique possible. De la même manière, les facteurs de risque non glycémiques devaient également faire l’objet d’une thérapie proactive, déclinée selon les habitudes et algorithme conventionnels pour une maitrise optimale au cours du suivi. Dans ce contexte, un traitement par aspirine, statines ou inhibiteurs du système rénine/angiotensine était déjà prescrit avant l’inclusion chez près de 80 % de l’ensemble des patients.

ÉTUDE EMPA-REG OUTCOME: RÉSUMÉ DES RÉSULTATS (9,10)

1. Dans le champ des glycémies et autres facteurs de risque conventionnels, l’étude mettait en évidence au cours de suivi sous Jardiance® une réduction de l’HbA1c de 0,4 %, vs. le placebo. Comme déjà précisé (cf. infra), il faut rappeler qu'une optimisation glycémique per se sous Jardiance® (vs. placebo) n'était pas un "endpoint" de l'étude, l'objectif étant d'atteindre une valeur d'HbA1c aussi proche que possible de celle sous placebo. Il fut aussi observé sous Jardiance® une perte pondérale de 3 % et une diminution respectivement de 4 et de 2 mmHg des tensions artérielles systolique et diastolique vs. le placebo. Le rapport LDL/HDL-cholestérol était inchangé.

2. Dans le champ cardiovasculaire, comme indiqué dans le tableau 1, l’étude démontrait de manière « forte », un bénéfice cardiovasculaire significatif dans le groupe Jardiance® aux deux doses de 10 et 25 mg/j par rapport au placebo (9). Ceci signifie qu’en termes d’objectif primaire (décès cardiovasculaire, infarctus ou AVC non fatal), il existait une réduction de risque de 14 %, signant ainsi une « supériorité » statistique de l’empagliflozine par rapport au placebo. Ce résultat « global » était sous-tendu par une diminution de mortalité cardiovasculaire de 38 % et de mortalité totale de 32 %. L’étude montrait également sous empagliflozine une diminution de 35 % du risque d’hospitalisation pour décompensation cardiaque. Il est important de noter que, pour l’ensemble de ces résultats, la « divergence » positive entre empagliflozine et placebo émergeait déjà après les trois premiers mois de traitement, et ce de manière quasi équivalente aux doses de 10 et 25 mg/j. Une revue complète de ces données a été publiée par Buysschaert en 2015 (14).

3. Dans le champ rénal, Wanner et al. rapportent des résultats particulièrement intéressants déclinés en deux axes. Celui d’abord de l’évolution des filtrations glomérulaires qui montrent en cours d’étude (à partir de la 5e semaine jusqu’à la fin de l’essai) un déclin annuel modeste de l’eGFR, significativement moindre sous empagliflozine que sous placebo (Tableau 2). Par ailleurs, en post-étude, comme l’indique également le tableau 2, il y a une « récupération » de l’eGFR après arrêt de l’empagliflozine qui n’est pas observée à l’arrêt du placebo (Δ eGFR en fin de follow-up : 4,7 ml/min/1.73 m2 pour 10 et 25 mg d’empagliflozine vs. le placebo). L’autre axe met en évidence une convergence de bénéfices en termes de néphropathie per se (Tableau 3). Le risque de survenue d’une néphropathie ou d’aggravation d’une maladie préexistante était significativement réduit (39 %) sous empagliflozine. Il en était de même pour la macroalbuminurie (-38 %) ou le doublement de la créatinine sérique (-44 %). Enfin, le recours à la dialyse en cours d’étude était également réduit de 55 % chez les patients recevant de l’empagliflozine vs. le placebo. Bref, l’évolution de la néphropathie était ralentie sous gliflozines. En synthèse, un objectif « composite » incluant la néphropathie (débutante ou aggravée) ou les décès cardiovasculaires était aussi diminué de 39 % dans le groupe actif vs. placebo (HR : 0,61 [0,55-0,69], p<0.001) (10).

DISCUSSION

Au vu des résultats de l’essai d’EMPA-REG OUTCOME, il nous semble que l’empagliflozine permet aujourd’hui une approche thérapeutique holistique du patient diabétique de type 2 à haut risque cardiovasculaire. À côté des bénéfices glycémique, pondéral et tensionnel faisant suite à son activité glucorétique, l’empagliflozine est en effet associée à des dividendes cliniques importants dans les champs cardiovasculaires et rénaux. Sachant la haute prévalence de ces deux complications chroniques dans le diabète de type 2 (15,16) – et leur interrelation –, la place de l’empagliflozine dans l’arsenal – et la stratégie – thérapeutique est donc parfaitement légitimée. C’est ce que mentionnent également les recommandations 2017 de l’Association Américaine du Diabète dans leur algorithme thérapeutique où les SGLT-2 inhibiteurs trouvent une place à part entière en bi –ou (tri)thérapie, après échec de la metformine (17). Les résultats cardiovasculaires très favorables ont d’ailleurs amené récemment la Food and Drug Administration (FDA) à valider la place de l’empagliflozine chez les diabétiques de type 2 à risque pour réduire les décès cardiovasculaires. Reste néanmoins à définir par d’autres études (actuellement en cours) si les bénéfices rapportés se retrouveront chez les diabétiques de type 2 à moindre risque cardiovasculaire (prévention primaire) et s’ils pourront être élargis à d’autres inhibiteurs des SGLT-2 (18,19). Cela étant, si le dividende clinique est évident chez les diabétiques à haut risque, les mécanismes physiopathologiques qui en rendent compte restent très discutés. Au vu de son émergence rapide, il est improbable qu’il puisse être expliqué par les « simples » réductions de l’HbA1c, la perte pondérale et/ou l’effet tensionnel. Le rôle d’une activité diurétique chez ces patients cardiologiquement fragiles a aussi été, à juste titre, souligné comme la réduction du volume plasmatique, la diminution de la rigidité artérielle ou l’augmentation du glucagon. Très récemment, Ferrannini et al. ont évoqué une autre approche physiopathologique en postulant, sous empagliflozine, un shift métabolique de l’utilisation du glucose vers celle, préférentielle, et plus rentable sur le plan énergétique, des corps cétoniques dont les taux sont légèrement augmentés sous gliflozines (20). Cette approche métabolique pourrait également rendre compte des bénéfices en termes de néphropathie comme souligné par Mudaliar et al. (21). D’autres auteurs évoquent pour expliquer les résultats rénaux, sous empagliflozine, l’excès de sodium au niveau de la macula densa qui stimule un feed-back tubuloglomérulaire aboutissant in fine à une vasomodulation de l’artériole afférente du glomérule et ainsi à une diminution de la pression intraglomérulaire, rendant compte du ralentissement du déclin rénal par rapport au placebo (22). Quoi qu’il en soit, d’autres études seront indispensables pour disséquer les voies physiopathologiques précises expliquant les résultats cardiovasculaires et rénaux très relevants de l’étude.

BÉNÉFICES ET PLACE DES GLIFLOZINES DANS L’ARBRE DÉCISIONNEL DU TRAITEMENT DU DIABÈTE DE TYPE 2

Les gliflozines occupent aujourd’hui par leurs effets pluriels sur la glycémie, le poids et la tension artérielle, une position validée dans le traitement du diabète de type 2. Cette place est encore consolidée sachant le contexte de macroangiopathie, illustré aussi par le Emerging Risk Factors Collaboration Group qui mettait en évidence chez des diabétiques à l'âge de 50 ans une « perte de vie » de cinq à six années (par rapport a un groupe contrôle), liée principalement à des maladies cardiovasculaires (23). Ce risque majoré de pathologies et de décès cardiovasculaires doit maintenant être intégré dans la réflexion thérapeutique, au vu, entre autres, des résultats d’EMPA-REG OUTCOME, en particulier la réduction de risque de mortalité cardiovasculaire et d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque. En Belgique, la prescription de Jardiance®, à la dose de 10 ou 25mg/j, est autorisée et remboursée pendant une période de 230 jours en bithérapie chez des sujets diabétiques de type 2, en association avec la metformine ou un sulfamidé hypoglycémiant/glinide, s’il y a contre-indication ou intolérance au biguanide et si ces médicaments, administrés à la posologie maximale pendant au moins trois mois, n’ont pas réussi à abaisser l’HbA1c en dessous de 7 %, à condition que la filtration glomérulaire soit supérieure à 60 ml/min/1.73 m2 (dans un souci d’efficacité glycémique) (Tableau 4). Jardiance® peut également être prescrit en trithérapie en association avec une combinaison [metformine et sulfamide/glinide] ou [metformine et pioglitazone] dans le même contexte de déséquilibre glycémique (HbA1c ≥ 7.0 et ≤ 9.0 %) ou avec une insuline basale associée à au moins un antidiabétique oral. Une prolongation de 400 jours est autorisée à condition que le taux d’HbA1c, après les premiers 230 jours, soit inférieur à 7.5 % (ou qu’il y ait une diminution de l’HbA1c d’au moins 0.5 %) et qu’une réduction de poids ait été objectivée par rapport à la valeur de départ. La prescription de Jardiance®, comme d’autres gliflozines, doit rester prudente chez des patients diabétiques traités par diurétiques de l’anse et/ou à risque de déplétion volémique. Une vigilance clinique s’impose donc logiquement chez des personnes âgées fragiles. Eu égard aux données cliniques, il apparait également raisonnable d’éviter les gliflozines, en particulier chez les femmes, en présence d’antécédents d’infections urinaires et/ou génitales récurrentes. Les règles de prescription devront sans doute intégrer demain les données rénales positives qu’EMPA-REG OUTCOME vient de rapporter.

CONCLUSION

Au vu de leur effet antihyperglycémique couplé à une perte pondérale et une réduction des chiffres de tension artérielle, démontré dans les études à court et long terme, les gliflozines occupent en 2017 une place de choix dans la démarche thérapeutique du diabète de type 2. Les données cardiovasculaires chez les patients à risque renforcent à ce stade cette place comme outil thérapeutique dans la prise en charge moderne du patient diabétique de type 2, en particulier lorsqu’il est en prévention secondaire. Cette stratégie est d’autant plus logique que les effets indésirables sont limités. Il y a donc aujourd’hui, dans l’arsenal thérapeutique, une avancée au service des patients.

Correspondance

Pr. (ém.) Martin Buysschaert

Chef de service honoraire

Cliniques universitaires UCL Saint-Luc

Service d’Endocrinologie et Nutrition

Avenue Hippocrate 10

B-1200 Bruxelles

martin.buysschaert@uclouvain.be

Références

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