Le cœur est une pompe qui va permettre d’éjecter le sang dans l’ensemble de la circulation sanguin afin d’assurer l’apport en oxygène et en substrats énergétiques du corps. Le système circulatoire respecte deux principes fondamentaux. Le premier est que l’apport en oxygène, fourni par le cœur, doit être en adéquation ou égal à la consommation de l’oxygène à l’ensemble de l’organisme. La consommation en oxygène (notée VO2) est égale au produit du débit cardiaque (DC) et de la différence de contenu artériel et veineux en oxygène (différence artério-veineuse, CaO2 – CvO2). L’équation est donc la suivante : VO2 = DC x (CaO2 – CvO2). Le contenu artériel en oxygène dépend de la saturation artérielle en oxygène et de la concentration d’hémoglobine. Le contenu veineux dépend de l’hémoglobine et de la saturation veineuse en oxygène. Rappelons que la saturation veineuse doit être mesurée au niveau de l’artère pulmonaire (saturation veineuse centrale). Tout augmentation de la consommation en oxygène va être accompagnée soit d’une augmentation du débit cardiaque ou d’une augmentation de l’extraction d’oxygène du système artériel (augmentation de la différence artério-veineuse).
Le deuxième principe est qu’il existe un couplage entre le cœur et les vaisseaux. Au niveau du cœur, le débit cardiaque est influencé par quatre facteurs : la précharge, la postcharge, la contractilité et la fréquence cardiaque (figure 1). C’est le couplage entre le ventricule et le système artériel qui va déterminer le niveau de pression artérielle moyenne et donc de postcharge et c’est le couplage entre le système veineux et le cœur qui va déterminer le niveau de retour veineux, de pression de l’oreillette droite et donc de précharge.
Tous ces acteurs (le cœur, le système vasculaire et l’extraction en oxygène) ont des capacités de réserve, permettant, au besoin, d’augmenter l’apport en oxygène de l’organisme, par exemple lors d’un exercice physique.
Le débit cardiaque est le produit du volume éjecté et la fréquence cardiaque. Le cœur et plus particulièrement le ventricule possède une réserve systolique, c’est-dire qu’il est capable d’éjecter d’avantage (diminution du volume télésystolique) par une diminution de la postcharge et/ou une augmentation de la contractilité. Il a également une réserve diastolique, permettant de se remplir davantage (augmentation du volume télédiastolique) et augmentant de cette manière la précharge (figure 2A). De plus, une augmentation de la fréquence cardiaque est possible jusqu’à la fréquence cardiaque maximale (fréquence est 220 – âge chez le sujet masculin) (figure 2B).
Par conséquent, grâce à ces capacités de réserve, le ventricule a une grande capacité de majorer son débit.
Les changements de précharge ou de postcharge sont possibles grâce à la plasticité du système circulatoire.
Au cours de l’effort physique, une augmentation importante du transport en oxygène est observée, jusqu’à la capacité de transport maximale. Comme nous l’avons mentionné plus haut, cette capacité de transport maximale sera égale à la consommation maximale en oxygène (VO2 max). La VO2 max est donc indice de la capacité maximale du sujet à faire un effort. Elle est proportionnelle au débit cardiaque maximale et l’extraction en oxygène maximale. Toute pathologie limitant le débit cardiaque à l’effort va se marquer par une diminution de la VO2 maximale (par exemple, en cas d’insuffisance cardiaque).
Lors d’un effort physique, une augmentation de la fréquence cardiaque est observée à cause d’une inhibition parasympathique puis d’une stimulation du système sympathique. L’augmentation du tonus sympathique sera également responsable d’une augmentation de la contractilité permettant une augmentation du volume éjecté (réserve systolique). Le retour veineux sera augmenté permettant une augmentation de la précharge, par une augmentation du tonus veineux, par une augmentation du retour veineux liée la contraction musculaire (servant de pompe) et enfin par une mobilisation des réserves splanchniques (couplage veino-ventriculaire).
Au total, le débit cardiaque peut être multiplié par 4 ou 5 au cours de l’effort.
Au cours de l’effort, une augmentation de la tension artérielle est observée. Pour rappel, la pression artérielle moyenne est à égale au débit cardiaque divisé par les résistances systémiques. Contrairement à une idée couramment répandue, cette augmentation de tension artérielle n’est pas liée à un effet du tonus sympathique sur les vaisseaux, entrainant une augmentation des résistances systémiques. L’augmentation de la tension artérielle est le reflet d’une augmentation du débit cardiaque. En effet, lors de l’effort, une vasodilation dite métabolique est observée limitant l’augmentation de la tension artérielle et donc l’augmentation de la postcharge (couplage ventriculo-artériel).
En situation basale, l’extraction en oxygène est d’environ 25 % (CaO2 – CvO2/Ca O2). L’extraction en oxygène sera majorée à l’effort et se combinera à une augmentation du débit cardiaque afin d’augmenter le transport en oxygène. En cas d’insuffisance cardiaque (lorsque le volume éjecté et donc le débit cardiaque ne peuvent que faiblement se majorer), l’extraction en oxygène peut se majorer jusqu’à 90 %.
Le sportif entrainé (athlète) va voir son cœur subir une hypertrophie ventriculaire gauche qui, par définition, sera une hypertrophie dite physiologique (l’hypertrophie correspond à une augmentation de la masse ventriculaire gauche). On observera également une augmentation du volume ventriculaire gauche (augmentation du volume télédiastolique) par rapport au sujet non entrainé. L’hypertrophie ventriculaire physiologique est associée à une augmentation des capacités de réserve (réserve systolique, diastolique et de fréquence). Par conséquent, la capacité maximale à l’effort (VO2 max) du sujet sportif est nettement majorée par une augmentation du débit cardiaque maximale à l’effort (figure 3). Sur le plan métabolique, le cœur du sportif présente une augmentation de ses capacités oxydatives (augmentation de l’oxydation des acides gras et augmentation de la biogenèse mitochondriale) par une stimulation d’un facteur transcription PGC1alpha (figure 4). De plus, l’hypertrophie physiologique est associée à une stimulation de l’angiogenèse, permettant une vascularisation adéquate du myocarde.
Tout ceci contraste avec ce qui est observé dans l’hypertrophie dite pathologique comme en cas de surcharge chronique de pression (par exemple, la sténose aortique) ou de volume (par l’exemple, l’insuffisance mitrale ou aortique). De ces cas de figure, le développement de l’hypertrophie pathologique entrainent une diminution de la capacité maximale à l’effort (VO2 max) par une diminution des capacités de réserves.
Le cœur couplé au système vasculaire est doué d’une grande capacité de réserve : une réserve de débit cardiaque (volume éjecté x fréquence cardiaque), une réserve de travail (volume éjecté x pression) et une réserve de puissance (débit cardiaque x pression). Cette réserve de puissance est énorme puisqu’elle est près de 450 %. Cette capacité est encore majorée par l’hypertrophie physiologique ou le cœur d’athlète. Par contre, en situation pathologique, elle est compromise.
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Pr. Christophe Beauloye
Cliniques universitaires Saint Luc
Service de cardiologie
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