Que retenir de 2024 en rythmologie ?

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Christophe Scavée, Sébastien Marchandise, Varnavas Varnavas* Publié dans la revue de : Février 2025 Rubrique(s) : Cardiologie
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Résumé de l'article :

C’est peu dire que la rythmologie a encore été marquante en 2024, et que le choix des articles à présenter a été cornélien. Le premier article analyse les grands changements opérés dans les dernières recommandations de la fibrillation atriale (non actualisés depuis près de 4 ans), et qui ont été à la fois présentés à l’ESC et publiés dans le même temps fin de cet été. Toujours dans le domaine de l’arythmie atriale qui concerne le plus grand monde (jusque 37% selon les tranches d’âge dans la population générale), le concept de cardiopathie atriale fait sa révolution. On connaît les paramètres associés au développement de la FA, comme les facteurs de risque, mais on connaît moins l’importance de la dilatation de l’oreillette gauche qui en est une conséquence et témoigne d’un certain remodeling comme élément déterminant de l’histoire de cette arythmie. Le deuxième article fait référence à cette notion de cardiopathie, son pronostic et les modalités d’analyse qui permettent de mieux l’identifier et probablement de poser de meilleures indications d’ablation. Le dernier de nos articles concerne une arythmie non moins majeure, la tachycardie ventriculaire (TV). Une cicatrice d’infarctus peut entraîner la formation d’un substrat à l’origine de TV. L’implantation d’un défibrillateur permet de délivrer des stimulations rapides ou des chocs pour récupérer des patients en arrêt cardiaque. Les patients sont parfois stabilisés par les traitements pharmacologiques dont les antiarythmiques. Ceux-ci peuvent se révéler non efficace ou occasionner comme l’amiodarone des effets secondaires importants. Une étude très intéressante, VANISH2 publiée dans le New-England-Journal en 2024 a tenté d’analyser l’efficacité de l’ablation du substrat arythmogène à l’origine des TV en première intention. Les résultats obtenus dans cet essai randomisé de 416 patients semblent très prometteurs et pourraient changer l’approche thérapeutique de cette patientèle très à risque. 

Mots-clés

Arythmie, fibrillation atriale, tachycardie ventriculaire, antiarythmique, CHA2DS2-VA, cardiopathie atriale, ablation

Article complet :

Nouveaux guidelines européens de la fibrillation atriale : « une évolution logique plutôt qu’une révolution »
Christophe Scavée

La fibrillation atriale ou FA touche 1-2% de la population mondiale, soit environ 11 millions d’européens. Associée à une forte morbidité et mortalité (+43%) (1), elle est considérée comme une véritable menace pour nos systèmes de santé. Comme on le sait elle n’a pas de cause spécifique, et n’est pas persistante chez tout le monde. Son évaluation, son pronostic, et plus largement la façon on doit s’en occuper évolue et nécessite des mises à jour dans les recommandations. Ainsi, à la fin de cet été, lors du congrès de la Société Européenne de Cardiologie ont été présentées de nouvelles recommandations (2). Si le patient reste au centre des préoccupations, on change toutefois la dénomination de sa prise en charge. Il avait été introduit précédemment le modèle « ABC » (Anticoagulation, Better Control, Comorbidities). Ce modèle est remplacé par le « AF-CARE » qui prône également une approche multidisciplinaire et dont voici le détail : 

C : il faut identifier les Comorbidités, et les facteurs de risque. Ces facteurs doivent être corrigés car ils participent réellement à la dégradation de la fibrillation atriale et à l’évolution vers la cardiopathie atriale (voir plus loin, texte du Pr Marchandise S.) : ils favorisent son émergence, le passage à la chronicité et la résistance au traitement

→ A rechercher et équilibrer une HTA (régime DASH, valeurs de tension ≤140/90mmHg), l’obésité (viser une diminution de 10% de poids corporel), l’alcool (idéalement zéro ou <3 verres/semaine), la sédentarité (30 minutes d’activité modérée/jour ou ≥180min./semaine), prise en charge de l’insuffisance cardiaque (régime, activité physique, traitement pharmacologique aux doses optimales), … On rappelle dans les recommandations que la mise en place d’un programme d’activité physique visant non seulement à perdre du poids mais aussi améliorer la capacité physique réduit les risques de récidives de fibrillation atriale que ce soit sous traitement pharmacologique ou en ablation. 

A : Anticoaguler le patient quand cela est indiqué permet la prévention des embolies et AVC (voir plus loin le changement de score de risque). 

R : Réduction des symptômes. Il faut optimaliser la prise en charge de l’arythmie et s’atteler à rendre les patients moins symptomatiques, plus heureux. Comme toujours, deux s’options s’offrent au médecin : le contrôle du rythme qui peut se faire par la prescription d’un antiarythmique ou l’ablation (isolation des veines pulmonaires, voire plus). Cette dernière option est de plus en plus privilégiée. L’impact de cette technique toutefois invasive conditionne bien plus que la qualité de vie, elle peut réduire les risques de mortalité, voire d’AVC

E : Evaluation et suivi régulier du patient. Les paramètres physiologiques d’un malade sont par nature dynamiques. Ainsi une évaluation répétée de la situation du malade s’impose. Les choix thérapeutiques, la sécurité sont au centre de cette dimension. 

Un grand changement attendu concernant le score de risque de l’AVC a été adressé. Le CHA2DS2VASC est remplacé par le CHA2DS2VA, ce qui signe la suppression du facteur « sexe féminin (Sc) » comme paramètre déterminant du risque. Les autres : IC, AVC, âge, diabète, AVC, patient vasculaire) demeurent inchangés. Les anticoagulants oraux directs (AOD) restent bien entendu la préférence contrairement aux AVK qui toutefois gardent des indications quand un AOD ne peut être utilisé. 

Pratiquement, en présence d’un score CHA2DS2VA : 

- Score ≥ 2, il y a une indication de classe I à anticoaguler. 

Score ≥ 1, l’anticoagulation est à considérer (classe IIa). 

Score 0 : pas d’indication d’anticoagulation (sauf cardiopathie hypertrophique, hyperthyroidie, amyloidose). 

Une place de plus en plus importante de l’ablation de la FA est mise également en lumière. Va-t-on toutefois vers de nouveaux paradigmes, stratégies et sources d’énergie ? L’isolation des veines pulmonaires, pratiquée depuis plus de 20 ans reste la base de cette stratégie thérapeutique. Dans la FA paroxystique, l’ablation est recommandée en première intention chez les patients symptomatiques en alternative aux antiarythmiques. Il en va de même chez les patients en insuffisance cardiaque à fraction d’éjection réduite (classe I). Dans cette sous-population, on a constaté une réduction de la mortalité et des ré-hospitalisations pour insuffisance cardiaque. Chez les patients en attente de greffe et/ou d’assistance ventriculaire, l’ablation semble également très bénéfique et doit être sauf contre-indication proposée. 

L’électroporation est une nouvelle source de traitement, qui devient petit à petit l’énergie de référence. Elle est non thermique, et a l’avantage de respecter les tissus que l’on veut épargner lors de l’ablation, comme l’œsophage. Elle a également dans ses atouts une déconcertante facilité d’utilisation, avec une déconnexion des veines pulmonaires obtenue en un temps record (quelques secondes), difficilement égalable par les autres sources dites thermiques qu’elles soient délivrées par le chaud (>50°C) ou le froid (-60°C). Son efficacité globale est d’environ 80% dans les FA dites paroxystiques et donc similaire aux technologies historiques. 

En conclusion, sans être une réelle révolution, nos recommandations actuelles sont en parfaite adéquation avec l’histoire de cette affection souvent chronique qu’est la FA et qui se nourrit des facteurs de risque traditionnels. Il faut une gestion proactive des comorbidités, concertée avec le patient, et avec les équipes de façon transversale. Il faut évaluer de façon continue et pertinente l’évolution du malade. Par ailleurs, il faut proposer l’ablation comme une option thérapeutique de choix. Il s’agit d’une procédure plus simple qu’autrefois, et dont les risques sont minimisés dans les mains expertes, et lors du respect des indications. 

Références

  1. Ruddox V et al. Atrial fibrillation and the risk for myocardial infarction, all-cause mortality and heart failure: a systematic review and meta-analysis. Eur J Prev Cardiol. 2017; 24 : 1555–66 
  2. European Heart Journal, Volume 45, Issue 36, 21 September 2024, Pages 3314–3414. 

De la cardiomyopathie atriale à la fibrillation atriale persistante
Sébastien Marchandise

La fibrillation atriale (FA) sous sa forme persistante représente un challenge pour le clinicien car les thérapies actuellement disponibles présentent de nombreuses limites, notamment avec le taux de succès moins bon des procédures d’ablation de la FA. Depuis plusieurs années, de nombreuses études et travaux de recherche ont montré que cette forme fréquente de FA se caractérise par une maladie du muscle atrial que l’on appelle la cardiomyopathie atriale et qu’un consensus d’expert (1) définit depuis 2016 comme : « Toutes modifications structurelles, architecturales, contractiles ou électrophysiologiques affectant les oreillettes avec le potentiel de produire des manifestations cliniquement pertinentes ». Ces manifestations cliniques comprennent les AVC, l’insuffisance cardiaque (IC) et le risque de démence cérébrale. La cardiomyopathie atriale et les modifications de la structure anatomique et fonctionnelle des oreillettes sont impliquées dans le développement et la progression de la FA. Elle est fortement associée au développement d’une fibrose atriale progressive, qui conduira finalement à la persistance de l’arythmie. Ces modifications sont favorisées par de nombreux facteurs comme étayés lors du texte précédent comme l’âge, le diabète, l’HTA, la maladie coronaire, les valvulopathies, les maladies respiratoires chroniques, les maladies inflammatoires, les syndromes d’apnée du sommeil…

La relation entre la FA et la cardiomyopathie atriale est complexe. Par exemple, la cardiomyopathie atriale peut exister sans FA et peut faciliter plus tard le développement de la FA. La FA n’est pas seulement un facteur de risque mais aussi un marqueur de la cardiomyopathie atriale, ce qui pourrait expliquer l’absence de relation temporelle entre la FA détectée et l’AVC (figure 1). Une approche « personnalisée » est préconisée pour optimiser la prise en charge et plusieurs outils d’imagerie sont disponible en clinique ou développé dans la recherche médicale pour évaluer ce « remodelage arythmogène ». Chaque technique d’imagerie présente des avantages, des limites et des pièges qui sont résumés dans la figure 2. 

En conséquence, les dernières directives de l’ESC présentées plus haut (2) se sont logiquement intéressées à ce concept novateur :

- Elles soulignent le rôle significatif de la cardiomyopathie atriale, et les progrès importants dans la compréhension des mécanismes de la FA et du risque thrombo-embolique. 

- Elles insistent à nouveau sur l’importance de corriger les facteurs de risque qui favorisent cette cardiomyopathie atriale. 

- Elles recommandent son évaluation avec des outils d’imagerie pour optimaliser sa prise en charge (échographie, IRM, …). 

Références

Goette A et al. EHRA/HRS/APHRS/SOLAECE expert consensus on atrial cardiomyopathies: definition, characterization, and clinical implication. Europace. 2016 Oct;18(10):1455-1490. 

Ablation de la Tachycardie Ventriculaire versus traitement antiarythmique ou l’essai VANISH 2
Varnavas Varnavas

L’essai VANISH 2, publié récemment, a apporté de nouvelles informations sur le traitement de la tachycardie ventriculaire (TV) (1).

Pour rappel, l’essai VANISH (2) précédent avait démontré que chez les patients atteints de cardiomyopathie ischémique et porteurs d’un défibrillateur automatique implantable (DAI), qui présentaient une TV malgré un traitement antiarythmique, l’ablation par cathéter de l’arythmie était associée à un taux significativement plus faible de l’end-point composite suivant : décès, TV ou tout traitement approprié par le DAI par rapport au traitement antiarythmique). 

L’essai VANISH 2 est un essai multicentrique, ouvert et randomisé. Un total de 416 patients a été recruté.

Les critères d’éligibilité pour l’inclusion étaient :

- Antécédents d’infarctus du myocarde 

- Au moins un des événements de TV suivants au cours des 6 mois précédents sans être traité par des médicaments antiarythmiques : 

a. TV monomorphe soutenue interrompue par un traitement pharmacologique ou une cardioversion électrique.

b. ≥3 épisodes ou plus, dont un épisode symptomatique, de TV traitée par stimulation antitachycardique (ATP- au moyen d’un DAI). 

c. ≥5 TV monomorphe, indépendamment des symptômes. 

d. ≥1 chocs appropriés de DAI. 

e. ≥2 ou trois épisodes de TV soutenues dans les 24 heures. 

Les patients inclus ont été assignés au hasard dans un rapport 1:1 à subir une ablation par cathéter (groupe ablation) ou à recevoir un traitement médicamenteux antiarythmique (groupe médicamenteux). Le groupe traité par antiarythmique a reçu du sotalol, ceux qui n’étaient pas éligibles pour un traitement au sotalol ont reçu de l’amiodarone. Tous les patients portaient un dispositif de DAI. 

Les principaux critères d’évaluation de l’étude étaient :

- Un composite de décès toute cause pendant le suivi ou >14 jours après la randomisation 

- Tout choc approprié du DAI 

- Un orage rythmique (au moins 3 événements de TV dans les 24 heures) 

- Un épisode de TV soutenue traitée en dessous de la limite de détection du DAI. 

Un événement primaire est survenu chez 103 des 203 patients (50,7%) assignés à l’ablation par cathéter et chez 129 des 213 (60,6%) assignés au traitement médicamenteux.

L’étude a conclu que les patients atteints de cardiomyopathie ischémique et de TV ventriculaire bénéficiaient le mieux d’une stratégie initiale d’ablation par cathéter plutôt que d’un traitement médicamenteux antiarythmique. Les résultats indiquent donc qu’au premier épisode d’arythmie maligne, proposer une ablation est certainement la meilleure stratégie. N’oublions pas que des médicaments comme le sotalol ou l’amiodarone ont en plus de leur relative mauvaise efficacité (surtout le sotalol) des contre-indications, et des effets secondaires parfois sévères qui rendent leur usage à long terme difficile. 

Références

  1. Sapp JL, Tang ASL, Parkash R, et al. VANISH2 Study Team. Catheter Ablation or Antiarrhythmic Drugs for Ventricular Tachycardia. N Engl J Med. 2024 Nov 16; doi: 10.1056/NEJMoa2409501.
  2. Sapp JL, Wells GA, Parkash R, et al. Ventricular Tachycardia Ablation versus Escalation of Antiarrhythmic Drugs. N Engl J Med. 2016 Jul 14;375(2):111-21. doi: 10.1056/NEJMoa1513614. Epub 2016 May 5. PMID: 27149033 

Affiliations

Service de Cardiologie – Unité de Rythmologie, Cliniques Universitaires Saint-Luc, B-1200 Bruxelles

* Les auteurs ont contribué de façon égale à la rédaction de cet article.

Correspondance

Pr Christophe Scavée

Responsable de l’Unité de Rythmologie

Ecrivain aux Ed. Mardaga, Caban et Racine

Cliniques Universitaires Saint-Luc - UCLouvain

Service de Cardiologie – Unité de Rythmologie

Avenue Hippocrate 10

B-1200 Bruxelles

christophe.scavee@uclouvain.be

Me suivre sur X : @ScaveeC

Il faut s’entrainer au bonheur
Professeur Christophe Scavée 

Nous ressassons dans notre tête des milliers de pensées par jour. La majorité sont similaires à celles de la veille, la majorité sont colorées négativement et représentent une surcharge émotionnelle pour la sérénité de notre d’esprit. Mais pourquoi ? Est-ce de la déprime, de la dépression ? Possible car ces ruminations sont souvent liées à des événements ou croyances stressantes mais dont l’origine est diverse. Le sentiment de crainte qui suit les crises sociétales qui se suivent à grande cadence, qu’elles soient identitaires, conflictuelles ou climatiques domine notre univers. Des incertitudes favorisent l’émergence des troubles mentaux, et bien plus encore. En effet, la corrélation entre le stress chronique, la dépression, les TOC, le syndrome post-traumatique et les maladies cardiovasculaires est scientifiquement bien étayée dans la littérature. Si ces tensions sociales s’imposent à nous, nous sommes parfois contraints à les affronter en simple spectateur totalement impuissant. La période COVID a amplifié les fractures sociales et généré du stress, de l’anxiété chronique, des états dépressifs, des suicides. Beaucoup s’y sont embourbés, certains se sont noyés. On ne compte plus les burnouts, les divorces, les suicides, … Le lockdown a développé le télétravail, mais pourquoi ? Gagner du temps, être chez soi, mais à quoi faire ? Face à son écran, le travailleur assis a moins développé son tissu social qui est aussi son support. Il s’est retranché, souvent disputé avec son conjoint, et est devenu sédentaire vissé sur sa chaise de bureau, ou au fond de son divan. Nombre d’activités ont été détruites, mais le stress n’a pas disparu et s’est amplifié comme en témoignent les statistiques mondiales1. Plus grave encore, il touche les jeunes qui imitent les plus âgés. Le grand-père devant son poste, papa sur son PC et le gamin sur sa tablette qu’il tête dès le plus jeune âge comme un biberon. Parfois il y passe plus de 4 heures par jour, musclant son pouce… Mais ce temps précieux, autrefois utile pour se parler, faire de l’exercice, de la relaxation, de la lecture est perdu. Comme un jeu de dominos, l’anxiété a engendré de la souffrance. Les jeunes vous disent : « je dep »… Ce « je déprime » raccourci mais qui ne l’est pas vraiment est un cri, témoignant de leur glissement de mal être vers une véritable souffrance mentale qui conduit à ne vouloir rien faire, à se sentir déshabité, inutile. Comment expliquer la perte de force musculaire, d’endurance, de vitesse chez nos jeunes, et tout simplement leur manque de motivation d’avancer ? Une partie de réponse vient de cette sédentarité écran qui s’est imposée dans notre société, au sein même des écoles, et sa compagne de mauvaise fortune, l’obésité. On a 11 ans, on ne joue plus au foot ou au basket, on est sur des réseaux sociaux interdits aux moins de 13 ans, on a 16 ans, et déjà sa trottinette électrique. Ils stressent, galopant derrière les « likes », ils deviennent allergiques au mode avion et tentent de trouver le sommeil entre deux pages web. Il parait qu’un like c’est un pic de dopamine, de sérotonine, mais pourtant aucunes de ces hormones du bonheur ne réduit l’effet désastreux du scrolling sur le mental des « sreenagers ». Alors pas étonnant qu’un enfant de 12 ans n’est pas capable de courir aussi vite que son grand-père de 60 ans, qu’il dorme 2 heures de moins en moyenne qu’il y a 20 ans, et soit en échec scolaire. 

Si on interroge un patient en consultation sur cette part d’anxiété rarement exprimée mais qui mine, vous ferez soudainement éclore une vérité : la racine d’une affection cardiaque, d’un AVC, d’une hypertension. Les maladies inflammatoires, le cancer en sont aussi une conséquence. Vous ferez aussi connaissance avec les amis des maladies mentales : les addictions et des mauvaises habitudes. Le sucre, la malbouffe et ses produits transformés, le tabac, l’alcool, les drogues, qui donnent aux gens cette illusion d’aller mieux, mais ne guérissent pas, et au contraire amplifient par effet miroir une situation dans laquelle le regard n’ose plus se plonger. « Docteur, j’ai honte mais je n’y arrive plus… A quoi bon prendre mon traitement, là où je suis arrivé, il n’y a plus d’issue… ». Je vous entends, mais y suis-je attentif ? Une génération stressée risque aussi de transmettre via les modifications de l’expression des gènes (épigénétiques) des maladies, et du stress2. Il y a urgence.

Alors, si votre corps est le seul endroit où vous devez vivre3, il mérite bien toute notre attention. Il faut retrouver du sens, réapprendre à être heureux, et cultiver l’optimisme, et éduquer. La route est longue, et la méconnaissance du public en la matière est effrayante. Cela vaut bien un livre comme « Mon stress, mon cœur, ma santé » qui se tourne vers le public, l’aide à décrypter les risques du stress. Les médecins ont cette légitimité et une forme de devoir : celui d’aborder ce sujet, pour sensibiliser les patients à cet enjeu de santé publique, et les encourager à adopter des comportements actifs pour se libérer et prévenir les dangers de ce mal du siècle.

1 OMS, article : « Les cas d’anxiété et de dépression sont en hausse de 25% dans le monde en raison de la pandémie de covid-19 ». https://www.who.int.
2 Tremblay re. Developmental origins of disruptive behaviour problems: the ‘original sin’ hypothesis, epigenetics and their consequences for prevention. J Child Psychol Psychiatry. Avr 2010:341-367.
3 Jim Rohn.