Un siècle de chirurgie orthopédique en Belgique passé en revue

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Maurice Einhorn Publié dans la revue de : Janvier 2022 Rubrique(s) : Ama Contacts
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Résumé de l'article :

La Société belge d’orthopédie a fêté l’année dernière son 100ème anniversaire. L’occasion de faire un tour d’horizon de son passé et de son avenir avec l’un de ses piliers, le professeur Jean-Jacques Rombouts (Université catholique de Louvain).

Article complet :

Jean-Jacques Rombouts, professeur extraordinaire émérite à l’Université catholique de Louvain, spécialiste en chirurgie orthopédique et en expertise médicale, a en outre exercé de multiples fonctions dans sa carrière : il fut chef de service d’orthopédie et de traumatologie aux Cliniques universitaires Saint-Luc entre 1996 et 2002, doyen de la faculté de médecine de l’Université catholique de Louvain entre 2002 et 2007 et directeur médical de la Clinique Saint-Anne/Saint-Remi, à Anderlecht entre 2007 et 2012, membre du Conseil national de l’Ordre des médecins de 2008 à 2020, dont il fut vice-président entre 2012 et 2020. Il fait encore aujourd’hui de la médecine d’expertise, pratiquement à temps-plein, mais n’exerce désormais plus aucune fonction officielle.

C’est en tant qu’ancien président de la Société Royale Belge de Chirurgie Orthopédique et de Traumatologie (Sorbcot1) que nous avons fait avec lui un tour d’horizon concernant la chirurgie orthopédique et cette société scientifique. Le moins que l’on puisse dire est que le Pr Rombouts s’est investi à fond dans la Société Belge d’Orthopédie, puisqu’il en a en effet été trésorier à partir de 1975, secrétaire général entre 1980 et 1989, vice-président en 1996 et, enfin, président en 1998-1999. Il a encore des années plus tard, en 2016, été commissionné par le président d’alors, Alain Hébrant, pour préparer un ouvrage commémoratif à l’occasion des 100 ans de l’institution(2). Il s’est donc attelé à cette tâche dès 2017. « J’avais une documentation abondante accumulée pendant 30 ans, mais confronté à la date-butoir de 2021, j’ai demandé la collaboration d’un professionnel de la rédaction, Jean Andris, médecin, journaliste médical et historien. Cette collaboration s’est étendue sur deux ans ». On s’est d’abord intéressé aux précurseurs, précise le Pr Rombouts. En pratique, « le traitement des blessures en Belgique démarre avec la bataille de Waterloo », mais on a fait ensuite des progrès considérables durant le 19ème siècle, particulièrement dans le domaine de la contention. Il faut retenir à cet égard l’invention, en 1852, du plâtre par Antonius Mathijsen, médecin hollando-belge. La Belgique peut s’honorer à cet égard du rôle d’Albin Lambotte, « un véritable génie », qui a codifié le traitement opératoire des fractures.

Peu après la Grande Guerre et la pandémie de grippe espagnole qui s’en est suivie, un groupe de cinq orthopédistes ont décidé de fonder la Société belge d’orthopédie, qui s’est réunie pour la première fois le 18 novembre 1921 à l’hôpital Saint-Jean, qui était une institution publique à l’époque. Les personnalités principales qui ont imprimé leur sceau sur son évolution dans l’entre-deux guerres furent Albin Lambotte, Jean-Joseph Delchef, qui a surtout travaillé sur la tuberculose osseuse et Robert Danis, qui introduisit la compression comme élément capital dans la stabilisation des fractures. « La plus grande découverte durant cette époque qui a précédé la Seconde Guerre mondiale, est le fixateur externe, dû à Lambotte ». J-J. Rombouts cite encore dans ce contexte le nom de Jean Verbrugge, collaborateur de Lambotte et qui a codifié toute une série d’instruments utilisés quotidiennement en orthopédie. Et de souligner que « toutes ces personnalités ont largement contribué à faire connaître à l’étranger l’orthopédie belge ». Jean Verbrugge à Gand et Pierre Lacroix à Louvain ont été les premiers professeurs d’orthopédie belges. Après la guerre c’est la véritable renaissance de l’orthopédie en Belgique. C’est ainsi notamment que la Revue d’orthopédie, qui existait depuis les débuts de la Société et constituait le bulletin de celle-ci, s’est transformée en Acta Orthopaedica Belgica, dans le cadre plus large des Acta Chirurgica et des Acta Medica. La revue et les Acta ont longtemps été publiés en langue française uniquement avec un résumé « esperanto ». à partir de 1993, les articles sont publiés en anglais, ce qui est également le cas pour les congrès, qui sont d’ailleurs toujours très fructueux, avec une assistance de 600 à 700 personnes.

En 1963 s’était produit le schisme, aboutissant à la création de la Belgische Vereniging voor Orthopedie en Traumatologie (BVOT) regroupant les orthopédistes de langue néerlandaise. Pendant les 20 années qui ont suivi, une multitude de contacts, dans lesquels le Pr Rombouts et le Dr Bouillet ont joué un rôle de premier plan, ont abouti à la mise sur pied d’une structure nationale, la Fédération Orthopaedica Belgica, regroupant donc le petit millier d’orthopédistes, actifs ou retraités, de notre pays. Sur le plan chirurgical, le grand progrès à partir des années ’60 a été l’introduction des prothèses totales, développées en Grande-Bretagne. Leur adoption en Belgique s’est faite très rapidement par certaines équipes, plus lentement par d’autres. L’arthroplastie de hanche a été pratiquée à partir de 1960, celle de genou à partir de 1970. On a ensuite vu apparaître d’autres interventions de ce type, pour l’épaule, le coude, la main, la cheville, etc. On a parallèlement connu une amélioration des techniques d’ostéosynthèse. On a aussi assisté à partir de la fin des années ’90 à l’apparition des techniques de chirurgie assistée par ordinateur.

Au 21ème siècle on a vu se développer toute une série de recherches destinées à améliorer les prothèses et dont certaines ont eu des résultats très positifs, à l’instar de l’utilisation de prothèses à couple en céramique. D’autres, comme les prothèses métal-métal se sont avérées défaillantes à assez court terme. Pour ce qui est de l’avenir, on travaille encore toujours sur l’amélioration des matériaux comme des techniques, mais un sujet important sera le développement de la médecine basée sur les preuves, bien plus difficile à mettre en œuvre en chirurgie orthopédique que dans la majorité des autres spécialités, notamment à cause de la difficulté de constituer des séries comparatives et en double aveugle, si bien que « l’on est nulle part en chirurgie orthopédiques pour ce qui est de l’EBM ».

Publié à l’occasion du 100ème anniversaire de la SORBCOT et diffusé à 1000 exemplaires, « Une histoire de la société belge d’orthopédie », co-écrit par Jean-Jacques Rombouts et Jean Andris, compte 233 pages richement illustrées. Il se termine par les réflexions du président Everard Munting sur l’avenir de la spécialité.

Références

1. https://www.sorbcot.be

2. « Une histoire de la Société Belge d’Orthopédie », Universa Press Wetteren, 2021