Chez les sujets jeunes sportifs (moins de 35 ans), la mort subite d’origine cardiaque est certes très médiatique mais très rare. Elle est estimée en Europe à 10/1million par an et aux Etats-Unis à 1,2 à 1,6/100000 athlètes par an (1). Les hommes sont 10 fois plus touchés par la mort subite que les femme.
Les anomalies cardiaques insoupçonnées pouvant mener à une mort subite (par arythmie ventriculaire dans la plupart des cas) chez le jeune sont souvent héréditaires ou congénitales (figure 1).
L’initiation d’une arythmie ventriculaire est rendue possible par la présence d’un substrat (congénital ou acquis), de conditions physiopathologiques (dérégulation du système autonome, des électrolytes, déshydratation, stimulation) et d’un mécanisme déclenchant tel que le sport extrême dans ce cas.
La pathologie sous jacente la plus fréquemment rencontrée dans ces situations dramatiques est la cardiomyopathie hypertrophique (près de 30% des cas de mort subite d’athlètes aux Etats-Unis), viennent ensuite les anomalies coronaires (congénitales ou acquises), la rupture aortique (syndrome de Marfan), la dysplasie arythmogène du ventricule droit (près de 25% des cas en Italie), les cardiopathies dilatées, myocardites et syndromes du QT long.
Ces différentes pathologies restant longtemps asymptomatiques, des programmes de dépistage ont été proposés par certaines fédérations, et même de manière systématique dans certains pays, en Italie par exemple.
En Belgique, la responsabilité repose sur les fédérations et différents clubs sportifs qui définissent leur ligne de conduite et les examens de dépistage qu’ils recommandent à leurs membres.
Ils ont pour but de dépister une pathologie cardiovasculaire silencieuse susceptible de mener à une mort subite.
- L’anamnèse porte sur les antécédents personnels et familiaux (cardiopathie, syncope, mort subite) et l’examen physique comprend l’auscultation cardiaque, une mesure tensionnelle, la palpation du pouls fémoral, la mesure de la fréquence cardiaque de repos et la recherche de signes cliniques du syndrome de Marfan.Ils ont une puissance limitée pour dépister des pathologies cardiovasculaires, et un nombre important de faux-positifs. Soixante-huit pourcent de jeunes athlètes participants à un dépistage volontaire ont répondu de façon positive à un questionnaire pré participatif, dont 54% ont été jugés bénins ou non cardiologiques ne nécessitant donc pas d’examen complémentaire. Dans cette même étude, l’examen physique était anormal dans 9,3% des cas (2).
- ECG 12 dérivations
Il augmente significativement la sensibilité de dépistage (90%), permettant de dépister précocement des cardiopathies et notamment la cardiomyopathie hypertrophique dont les anomalies électriques précèdent les manifestations cliniques, ou des anomalies électriques primaires. L’interprétation de l’ECG est donc un outil primordial pour le praticien, permettant de différencier des modifications physiologiques du cœur d’athlète de conditions pathologiques. Les critères de Seattle (figure 2) ont été élaborés en 2012 dans cette optique et permettent de diminuer les faux positifs de 17% à 4,2% tout en gardant une très bonne sensibilité (3). De plus, en Italie où le dépistage systématique des athlètes est obligatoire depuis 1982, l’incidence annuelle de mort subite cardiaque a diminué de 89% chez les athlètes ayant été dépistés (4). Il est important de noter toutefois qu’en Vénétie, région où l’étude a été menée, une forte prévalence de dysplasie arythmogène de ventriculaire droit est observée.
- Autres examens
Aucun examen supplémentaire n’est recommandé dans le cadre d’un dépistage systématique. L’échographie cardiaque et l’épreuve d’effort ne sont réalisées qu’en 2e ligne si l’anamnèse, les antécédents ou l’électrocardiogramme font suspecter une cardiopathie sous-jacente.
Le dépistage pré participatif des jeunes athlètes a pour but de dépister une pathologie cardiovasculaire silencieuse pouvant mener à la mort subite. Les recommandations européennes concernant ce dépistage préalable à la pratique du sport datent de 2010 et préconisent la réalisation d’une anamnèse, d’un examen clinique et d’un électrocardiogramme.
Cependant, le rapport du KCE de 2015 estime que le rapport coût-bénéfice de l’électrocardiogramme n’est pas favorable et que son efficacité pour détecter des cardiopathies à risque de mort subite n’est pas démontrée (5).
Un dépistage systématique n’est donc pas recommandé, et l’appréciation de la réalisation d’un examen médical est laissée aux différents clubs et fédérations du sport.
Tout médecin peut réaliser un test d’éligibilité sans qu’il n’y ait aucune qualification spécifique requise.
Maron BJ, Haas TS, Murphy CJ, Ahluwalia A, Rutten-Ramos S. Incidence and causes of sudden death in U.S. college athletes. J Am Coll Cardiol 2014; 63:1636-43.
Fudge J, Harmon KG, Owens DS, Prutkin JM, Salerno JC, Asif IM et al. Cardiovascular screening in adolescents and young adults: a prospective study comparing the Pre-participation Physical Evaluation Monograph 4th Edition and ECG Br J Sports Med 2014; 48 : 1172–1178.
Brosnan M, La Gerche A, Kalman J, Lo W, Fallon K, MacIsaac A, Prior D. The Seattle Criteria increase the specificity of preparticipation ECG screening among elite athletes. Br J Sports Med 2014; 48:1144-50.
Corrado D, Basso C, Pavei A, Michieli P, Schiavon M, Thiene G. Trends in sudden cardiovascular death in young competitive athletes after implementation of a preparticipation screening program. JAMA 2006; 296:1593–1601.
Desomer A, Gerkens S, Vinck I, Léonard C, Neyt M, Paulus D, Van Brabandt H. Faut-il un dépistage cardiaque pour les jeunes sportifs ? – Synthèse. Health Technology Assessment (HTA). Bruxelles: Centre Fédéral d’Expertise des Soins de Santé (KCE). 2015. KCE Reports 241Bs. D/2015/10.273/28.
Dr. Cynthia Barbraud
Cliniques universitaires Saint-Luc
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cynthia.barbraud@uclouvain.be