RÉÉDUCATION MOTRICE ET COGNITIVE DES PATIENTS CÉRÉBRO-LÉSÉS
L’accident vasculaire cérébral (AVC) est la première cause d’incapacité permanente chez l’adulte. Les patients atteints d’un AVC peuvent présenter des troubles moteurs (pe diminution du contrôle moteur, parésie, spasticité, perte de dextérité) et des troubles cognitifs (pe héminégligence, ataxie, aphasie). Ces troubles justifient une rééducation intensive, précoce et prolongée. Des recommandations de bonnes pratiques ont été publiées en 2016 (1) : cette rééducation doit être intense, multidisciplinaire, orientée vers des tâches fonctionnelles et présenter des feedbacks au patient. Cependant, mettre en place et maintenir cette rééducation est un réel défi. D’une part, les systèmes de santé font face à une augmentation de l’incidence des AVC et des besoins en rééducation. Un nombre grandissant de patients ont besoin d’une rééducation plus intense dans un contexte économique difficile. D’autre part, pour les patients qui doivent s’investir dans un parcours thérapeutique long et exigeant pour récupérer et maintenir leurs capacités fonctionnelles. Souvent, leur motivation et leur adhérence diminuent avec le temps.
Les nouvelles technologies constituent un apport important pour appliquer les recommandations de bonne pratique, et faire face à ce défi. Parmi celles-ci, la robotique de rééducation et les jeux sérieux devraient permettre d’intensifier la rééducation et de maintenir la motivation tout au long du traitement, à un coût raisonnable.
LA ROBOTIQUE DE RÉÉDUCATION
La robotique de rééducation est en pleine expansion ces dernières années. Les robots permettent une rééducation intense, fournissent de l’assistance en fonction des besoins du patient et lui présentent des feedbacks sur les mouvements accomplis. Une récente méta-analyse (2) a montré que la thérapie assistée par la robotique améliorait la fonction et la force du membre supérieur des patients ayant présenté un AVC. Les robots de rééducation ont également l’avantage de pouvoir évaluer le patient de manière objective, quantitative et continuelle tout au long de la rééducation, y compris pendant les exercices (3). Le REAplan est un robot de rééducation du bras à effecteur distal développé au CEREM à l’UCL (J. Sapin & B. Dehez). Il permet des mobilisations de la main dans un plan horizontal. Il est muni d’une poignée pourvue de capteurs de force et de position, d’un moteur afin d’assister ou de perturber le mouvement du patient, d’un écran placé en face du patient pour lui présenter des feedbacks et d’un écran pour le thérapeute afin de programmer l’exercice (figure 1). Le REAplan est actuellement utilisé dans le service de médecine physique dans le cadre de différentes études cliniques.
LES JEUX SÉRIEUX
Les jeux sérieux se définissent comme des jeux ayant un premier objectif autre que l’amusement. En rééducation, cet objectif est de favoriser la récupération fonctionnelle par le biais de jeux qui rendent la rééducation ludique (figure 2). Les thérapeutes augmentent ainsi la motivation des patients et leur adhérence au traitement (4). Le caractère sérieux du jeu implique aussi sa capacité à s’adapter continuellement aux performances du patient. En effet, l’efficacité thérapeutique d’un exercice dépend de son taux de réussite (idéalement +/- 70%). Les exercices trop faciles ou trop difficiles n’engendrent aucun bénéfice fonctionnel et démotive le patient. Les jeux sérieux permettent également de prendre en compte les troubles cognitifs, comme par exemple l’héminégligence. Lorsque le patient ne détecte pas un stimulus, le système peut lui fournir des indices visuels, auditifs ou haptiques afin d’attirer son attention vers ce stimulus.
Ces jeux peuvent être utilisés sur différents supports. Il est possible de les utiliser sur des périphériques relativement bon marchés et présents dans de nombreux de foyers (pe tablette, Kinect).
COMBINAISON DE CES TECHNOLOGIES
Les robots de rééducation et les jeux sérieux sont donc deux technologies innovantes permettant d’améliorer la rééducation des troubles moteurs et cognitifs des patients cérébro-lésés. Leur complémentarité est à la base du projet ROBiGAME mené par une équipe de recherche multidisciplinaire des Cliniques universitaires Saint-Luc, de l’UCL et de l’UMons (financement « WB Health » de la Région Wallonne). Son objectif est de développer un jeu sérieux pour les robots de rééducation du bras, prenant simultanément en charge les troubles moteurs et cognitifs. Le prototype est actuellement en test. Combinant les avantages de ces deux technologies, ROBiGAME devrait compléter l’arsenal thérapeutique à disposition des équipes de rééducation afin de promouvoir la récupération fonctionnelle des patients cérébro-lésés.
Affiliations
Correspondance
Pr. Thierry Lejeune
thierry.lejeune@uclouvain.be
RÉFÉRENCES
1. Winstein CJ, Stein J, Arena R, et al. Guidelines for Adult Stroke Rehabilitation and Recovery: A Guideline for Healthcare Professionals From the American Heart Association/American Stroke Association. Stroke 2016;47(6):98-169. ouvrir dans Pubmed
2. Veerbeek JM, Langbroek-Amersfoort AC, van Wegen EE, Meskers CG & Kwakkel G. Effects of Robot-Assisted Therapy for the Upper Limb After Stroke: A Systematic Review and Meta-analysis. Neurorehabil Neural Repair 2017, Vol. 31(2) 107–121.
ouvrir dans Pubmed
3. Gilliaux M, Lejeune TM, Detrembleur C, Sapin J, Dehez B, Selves C, et al. Using the robotic device reaplan as a valid, reliable, and sensitive tool to quantify upper limb impairments in stroke patients. J Rehabil Med. 2014;46:117–25. ouvrir dans Pubmed
4. Cargnin D, D’Ornellas M & Cervi A. Evaluating the Impact of Player Experience in the Design of a Serious Game for Upper Extremity Stroke Rehabilitation. Studies in Health Technology and Informatics. 2015; 363–367.
ouvrir dans Pubmed