Objectif
Ce mémoire historique permet au lecteur de redécouvrir la sémiologie de la neurosyphilis du XIXe et du XXe siècle et de voir son évolution jusqu’à nos jours. Ce travail aborde également les grandes avancées scientifiques dans le monde de la neurologie durant ces deux siècles. Il met en évidence ces avancées en regardant l’évolution des théories scientifiques concernant la neurosyphilis. Arthur Van Gehuchten (1861-1914), neurologue belge et Professeur de neurologie à l’Université Catholique de Louvain, est une figure marquante de la neurologie au XIXe siècle. Il nous a laissé de nombreux textes scientifiques et une multitude d’illustrations concernant les pathologies neurologiques, qui sont la base de notre analyse. Son travail concernant la neurosyphilis est riche d’enseignements encore pertinents de nos jours.
Contexte
La syphilis, dont les premières traces écrites trouvées en Europe datent de la fin du XVe siècle, est une maladie vénérienne très répandue au XIXe siècle. Aucun traitement efficace n’est connu à l’époque et ses atteintes neurologiques sont donc fréquemment rencontrées. Il faut attendre 1905 pour que Schaudinn et Hoffman identifient enfin l’agent causal de la syphilis : Le Treponema pallidum pallidum. Un an plus tard, August Wassermann, Albert Neisser et Carl Bruck développent un test diagnostique : la réaction de Wassermann. Malgré ces avancées majeures et étant donné l’absence de traitement, la neurosyphilis reste un problème significatif pour les neurologues du début du XXe siècle. Les tableaux cliniques rencontrés sont impressionnants et les descriptions sémiologiques de l’époque sont particulièrement riches. De nos jours, malgré l’introduction de la pénicilline, des cas de neurosyphilis continuent d’apparaître. Cette pathologie et sa clinique étaient bien connues au XIXe siècle mais semblent être tombées dans l’oubli de nos jours. Actuellement, il existe donc un véritable risque de manquer le diagnostic. Un rappel des signes cliniques de la neurosyphilis ainsi qu’une idée du diagnostic différentiel reste donc utile pour le clinicien.
Méthode
Pour avoir une idée précise des connaissances de l’époque concernant la neurosyphilis, ce mémoire se base sur l’analyse des travaux d’Arthur Van Gehuchten (1861-1914). Ses deux ouvrages de référence ‘L’Anatomie du système nerveux de l’homme’ et ’Les Maladies Nerveuses’ ainsi que les cinq articles scientifiques concernant la neurosyphilis qu’il a rédigés sont notre base de travail. Nous avons donc recherché ces documents dans les archives et nous les avons ensuite analysés. De plus, une des richesses des travaux d’Arthur Van Gehuchten est leur illustration. Outre les schémas, Arthur Van Gehuchten n’hésite pas à prendre des photographies de ses patients, de ses dissections ou de ses expériences animales pour faciliter la compréhension du lecteur. Dans un souci didactique, il va jusqu’à filmer ses patients pour permettre à ses étudiants d’avoir une meilleure compréhension des signes sémiologiques. Ces 548 vidéos et plus de 630 photographies, retrouvées sans dossier médical associé, ont été rassemblées à l’Université Catholique de Louvain et constituent un héritage historique inestimable. En se basant sur les descriptions sémiologiques d’Arthur Van Gehuchten, nous avons retrouvé dans ces documents iconographiques 43 séquences cinématographiques et 41 photographies de patients présentant une symptomatologie compatible avec la neurosyphilis. Dans notre mémoire, nous analysons et comparons les descriptions sémiologiques et illustrations d’Arthur Van Gehuchten avec les présentations de la neurosyphilis que l’on rencontre dans la littérature scientifique actuelle. Ceci nous permet de voir jusqu’à quel point le travail de Van Gehuchten reste d’actualité.
Conclusion
Les travaux d’Arthur Van Gehuchten nous montrent qu’en plus d’être un scientifique mondialement reconnu, ce scientifique belge est un innovateur. Il nous offre une base de travail riche et précise pour analyser la neurosyphilis et son expression avant l’ère de la pénicilline. Même s’il faut rester critique vis-à-vis des critères diagnostiques de l’époque et garder en tête une série de diagnostics différentiels, les travaux d’Arthur Van Gehuchten nous offrent une description sémiologique ‘typique’ de la neurosyphilis (et surtout du tabès) qui mérite d’être gardée en tête par tout clinicien.
Affiliations
Promoteur : Pr. Anne Jeanjean
Cliniques universitaires Saint-Luc, département de Neurologie, B-1200 Bruxelles