Après des semaines, des mois et des années de stress et d’efforts, c’est un temps de reconnaissance, d’abord envers vous-mêmes qui avez mené à bien votre formation, mais également envers vos parents, vos familles, vos proches, vos collègues de faculté, vos professeurs et assistants, bref celles et ceux qui ont soutenu ce parcours, à travers ses joies et parfois aussi à travers ses peines.
En Faculté de médecine, cette fête se voile d’une ombre que je ne veux pas occulter. Vous avez porté, bien plus que d’autres, votre lot de peines et d’inquiétudes.
Votre parcours a été trop souvent menacé par des embûches politiques génératrices d’un climat d’incertitude pesant sur les conditions d’octroi des numéros INAMI.
Votre parcours a également été bouleversé par un basculement imposé aux universités : le passage de la durée des études de 7 à 6 ans, alors que vous entamiez votre cursus.
Cette situation inédite a fait l’objet, et continue à faire l’objet, d’une attention toute particulière de la part de l’UCL et de la part de la Faculté de médecine et de dentisterie. Avec votre Vice-Recteur de secteur, votre doyen et les équipes facultaires, de nombreuses réunions du Conseil rectoral ont abordé cette question pour en suivre l’état d’avancement.
L’UCL a mobilisé ses ressources et ses réseaux, se faisant le relais auprès de tous les acteurs concernés, responsables politiques et hôpitaux, en particulier ses deux cliniques universitaires et les hôpitaux du Réseau Santé Louvain, pour que chacun d’entre vous ait un maximum de chances de trouver une place de stage qui soit un juste reflet de ses aspirations.
C’est ainsi que l’université a pris la décision, il y a plus d’un an, de dégager des moyens financiers exceptionnels afin de créer le plus de places possibles. Cela n’a pas été sans mal, sans obstacles, sans doutes et parfois découragement. Ces efforts se sont maintenant concrétisés dans des résultats : je souhaite remercier celles et ceux qui ont accepté de relever cet énorme défi, les équipes du secteur des sciences de la santé et de la faculté, les directions des hôpitaux et les maîtres de stage.
Au-delà de cette difficulté, je ne ferai pas l’impasse non plus sur les déceptions que la diplomation ne peut dissimuler. Comme pour toutes les générations de médecins qui vous ont précédés, les études de médecine vous placent dans une situation tout à fait particulière : votre diplôme est, plus qu’ailleurs, un commencement et les portes qui s’ouvrent à vous aujourd’hui ne sont pas toujours celles auxquelles vous aviez pensé en entamant vos études. Pour l’attribution des places de stage, l’UCL a fait le choix de mettre en place une procédure aussi juste et objective que possible.
Sachez-le, nous sommes conscients des dépits qui vous tenaillent parfois. Nous sommes conscients des limites de nos actions. Nous nous efforçons, et ici plus encore qu’ailleurs, de vous soutenir sans relâche.
Malgré toutes ces réserves, chaque séance de diplomation est un moment d’émulation et de bonheur. Avec vous, notre communauté universitaire s’agrandit et nous en sommes fiers.
Aujourd’hui, je voudrais prendre du recul avec vous en retournant au cœur même de notre raison d’être. Car je suis convaincu qu’une formation universitaire, c’est aussi une vision généreuse et innovante pour le monde que nous avons le devoir d’habiter et d’humaniser.
Durant toutes vos années de formation, vous avez appris, éprouvé, vu et ressenti cette immense diversité : celle des provenances, des langues, des cultures, des histoires, des vies et des visages ; mais aussi celle des parcours académiques, des programmes, des organisations, bref, vous avez été au cœur de la complexité humaine.
À travers cette diversité et cette pluralité des apprentissages et des savoirs, vous avez tissé des réseaux, lié des amitiés et des contacts, participé à des dynamiques positives qui vous ont grandis humainement et qui feront évoluer durablement notre monde.
Au cœur même de notre projet de communauté universitaire, il y a la volonté de construire un monde plus fraternel. Une université doit être un lieu cosmopolite d’échanges où nous avons l’obligation morale de construire, de jeter des ponts, de favoriser les interactions, de créer des solidarités nouvelles.
Chères étudiantes, chers étudiants, nous ne sommes pas faits pour le cloisonnement car la nature même de l’intelligence et de la connaissance est d’être ouverte et communicative.
Restez des femmes et des hommes engagés, soucieux des besoins individuels et collectifs, soyez inclusifs et participatifs. Développez cette faculté d’empathie, par le biais de laquelle vous serez capables de reconnaître autrui, d’agir avec et pour lui, au gré des divergences et des convergences des opinions.
Gardez vif ce pouvoir d’écouter autant que de parler, de comprendre le point de vue de chaque interlocuteur, de tenir un discours rationnel, sans se laisser influencer par les préjugés.
Le serment que vous avez prononcé est magnifique. Inspiré du texte fondateur de la déontologie médicale d’Hippocrate, il a été adopté par l’Association médicale mondiale au sortir de la deuxième guerre mondiale, quelques mois avant la déclaration universelle des droits de l’homme.
C’est un texte fort. Relisez-le. C’est votre serment. La santé du patient est votre premier souci. Vos collègues sont vos frères et vos sœurs. Vous avez pris l’engagement solennel de consacrer votre vie au service de l’humanité.
Faites que le serment que vous avez prononcé ne soit pas vain. Je forme le vœu que vous puissiez infléchir le cours des choses, empêcher les fatalités, lutter contre les inégalités et favoriser l’émancipation.
Très chers diplômés, vous êtes désormais Louvain. Vous en portez les valeurs, l’esprit et aussi la responsabilité.
C’est avec joie que je vous propose de rester toujours des nôtres. Louvain ne vous oubliera pas. N’oubliez pas Louvain, votre Alma Mater.
Bon vent à toutes et tous.