Réactions d’hypersensibilité péri-opératoires
Didier EBO
Introduction
Le Professeur Ebo, a présenté durant cet exposé les résultats de 17 ans (2001-2018) de recherche dans son département concernant les réactions d’hypersensibilité, réactions survenues dans les deux heures suivant une anesthésie générale et intervention chirurgicale. Ont été exclues de cette étude, les réactions survenant plus de 2 heures après l’intervention, les réactions non liées à la dégranulation des mastocytes, les bronchospasmes ou hypotensions liés à l’asthme ou à des pathologies cardiaques. 688 patients ont été inclus dans l’étude. Parmi ces 688 patients, 608 réactions d’hypersensibilité ont été retrouvées. L’âge médian était de 46.7 ans, avec cependant une atteinte de tous les âges. Le sexe ratio était de 2 femmes pour 1 homme. Seule exception, une prédominance masculine pour les allergies à la Chlorexidine (graphique 1).
Classification des réactions d’hypersensibilité
La classification de la sévérité des réactions péri-opératoires permet de guider la prise en charge initiale et le traitement de ces réactions.
Une classification de 5 grades est utilisée, publiée par le NAP6 (national auditproject) (Tableau 1).
Dans l’étude rapportée par le Professeur Ebo, 2/3 des patients ont eu une réaction de grade 3 et 4, qualifiées d’anaphylaxie. Toutefois, le Professeur Ebo encourage les anesthésistes à référer les grades « non anaphylactiques » (grades 1 et 2) afin de réaliser un bilan pour ces patients également.
Traitement de la réaction d’hypersensibilité
Dans la cohorte de patients étudiée, l’adrénaline était surtout utilisée dans les réactions de grade 3 et 4. Il ressort néanmoins que près de 20% des grades 4 n’ont pas bénéficié d’adrénaline intra-veineuse. Un deuxième élément troublant concerne le remplissage ; seul 31% des patients ayant une réaction de grade 3 et 4 ont été perfusés (graphique 2). 11% des patients de l’étude ont bénéficié d’une réanimation. L’intervention chirurgicale a dû être interrompue pour 1/3 des patients (28%) mais concernait environ pour la moitié des grades 3 et 4. Il n’est cependant pas toujours nécessaire d’interrompre l’intervention. C’est aux anesthésistes de décider de suspendre l’intervention ou non selon l’importance de la réaction et la nécessité de l’intervention (chirurgie carcinologique vs. esthétique,…), balance bénéfice/risque.
Dosage de la tryptase
Le dosage sérique de la tryptase, marqueur d’activation mastocytaire (MCA), est une analyse à effectuer dans le décours immédiat de la réaction. Le dosage doit se faire entre 30 et 90 minutes après la réaction. Un dosage réalisé trop tôt ou trop tard expose à des faux négatifs. Ce dosage ne nous renseigne pas sur la cause de la réaction mais sur la pathogenèse.
Le seuil classique de 11.4 µg/L est à abandonner. Le seuil d’activation mastocytaire dépend de la tryptase de base. On considère une activation mastocytaire lorsque le dosage de la tryptase dépasse le seuil calculé par la formule suivante : (tryptase basale X 1.2) +2.
Exemple pour une tryptase de base de 5 : (5 x 1.2) +2 = 8.
La tryptase de base est dosée entre 24h et 8 semaines après la réaction.
Il faut doser la tryptase dans tous les grades. L’activation des mastocytes est principalement retrouvée dans les réactions de grade 3 et 4 (dans 90% des cas) mais aussi dans les grades non anaphylactiques, grades 1 et 2 (dans 1/3 des cas) (graphique 3).
Identification de la cause de la réaction
La sévérité de la réaction et l’activation mastocytaire (MCA) ne sont pas prédictives de la cause. De même le temps entre l’administration et la survenue de la réaction n’est également pas prédictif de la cause (graphique 4). Dans l’étude du Professeur Ebo, l’agent causal n’a pu être déterminé que dans 1/3 des cas.
Un diagnostic a pu être établi dans 40% des grades 3 et 4 sans activation des mastocytes et dans 90% avec activation des mastocytes. Pour les grades 1 et 2, avec ou sans activation des mastocytes, une cause a été identifiée dans la moitié des cas. Il est dès lors important d’effectuer les tests également chez les patients ayant eu une réaction de grade 1 et 2 ou sans activation mastocytaire. Les causes varient d’un pays à l’autre (Tableau 2) : dans la plupart des pays, les curares prennent la première place et devancent les antibiotiques (dont la prévalence est en augmentation), le latex (prévalence en diminution) et la chlorhexidine.
Les tests in vitro restent intéressant à réaliser (IgE spécifiques et tests d’activation des basophiles) même au-delà de 3 ans après la réaction initiale, malgré certaines publications récentes dénonçant une baisse de sensibilité au-delà de 3 ans.
Curares (Neuromuscular Blocking Agents NMBA)
Rocuronium (Esmeron®)
Le Rocuronium, curare non dépolarisant de la famille des aminostéroïdes, est le curare le plus fréquemment utilisé. Les curares non dépolarisants de la famille des benzylisoquinolones tels que le Mivacurium (Mivacron®), Cisastracurium (Nimbex®), Atracurium (Tracrium®) sont parfois également administrés mais moins fréquemment (graphique 5).
L’hypersensibilité allergique au Rocuronium est déterminée par trois tests : les tests cutanés (prick tests et intradermo réactions), le test d’activation des basophiles (TAB) et les IgE spécifiques.
Les valeurs prédictives positive et négative de ces tests ne sont pas très bonnes. Il existe 10-15% de non répondeur pour les TAB (Tableau 3).
L’algorithme actuellement proposé afin d’établir le diagnostic se base initialement sur la clinique et le dosage de la tryptase sérique (lors de la réaction et en comparaison de la tryptase basale). Lorsque les tests cutanés (prick et IDR) sont positifs, le diagnostic est établi (PPV= 98%, NPV= 96%). Lorsque ceux-ci s’avèrent négatifs, le test d’activation des basophile est effectué et s’il est positif, le diagnostic est établi (PPV= 97%, NPV = 75%). Dans le cas contraire, les IgE spécifiques sont dosés, s’ils sont positifs, un test de provocation est recommandé (bien que difficilement réalisable pour les curares, possible à dilution 1/100ème). Dans le cas contraire, lorsque les trois tests sont négatifs, le diagnostic d’hypersensibilité allergique immédiate peut être exclu.
Dans le cas des curares, les tests d’activation des basophiles permettent le diagnostic dans 8% des cas lorsque les tests cutanés sont négatifs (seuil du TAB Rocuronium est de 4%) et leur sensibilité est évaluée à 60-65% pour ces molécules. Les tests cutanés restent cependant le bilan à réaliser en première ligne. Les IgE spécifiques seuls ne sont, quant à eux, pas suffisant pour établir le diagnostic d’hypersensibilité aux curares.
Opiacés
Le diagnostic hypersensibilité aux morphiniques ne peut être posé ni avec les IgE spécifiques, ni avec les tests cutanés. En effet, les tests cutanés n’aide pas à établir un diagnostic dans le cas des morphiniques, la codéine étant par exemple utilisée comme témoins positif lors de la réalisation des prick tests. Les IgE spécifiques de la morphine sont des marqueurs de sensibilisation aux ammoniums quaternaires et tertiaires et non d’hypersensibilité aux opiacés. Ils sont positifs lors d’une hypersensibilité au rocuronium mais pas lors d’une hypersensibilité à l’atracurium.
Par ailleurs, les IgE spécifiques aux graines de pavot et aux morphiniques sont positifs dans 10% de la population, particulièrement chez les patients atopiques. Il est important donc de ne pas se baser sur ceux-ci pour établir un diagnostic de réaction allergique à la morphine et codéine.
Les réactions allergiques vraies aux morphiniques sont très rares (10 cas décrits dans la littérature). Les opiacés sont des histamino-libérateurs non spécifiques et les réactions observées sont donc bien souvent des réactions d’hypersensibilité non-allergiques.
Antibiotiques
La Céphazoline est responsable de 90% des réactions aux antibiotiques. La concentration des tests cutanés est à augmenter à 2mg/ml pour éviter les faux négatifs. Il n’y a actuellement pas d’apport des TAB, aucun patient ayant des tests cutanés négatifs à la céphalosporine n’ayant eu un TAB positif.
Chlorexidine
La chlorexidine représente la 4ème cause de réaction péri-opératoire. Le diagnostic d’hypersensibilité est basé sur les trois tests, tests cutanés, TAB et IgE spécifiques. La chlorexidine est un allergène à ne pas négliger. Il existe des hypersensibilités immédiates de type I à la chlorexidine présente notamment sur des cathéters intra-veineux. Les réactions se manifestent généralement dès la mise en place du cathéter. On retrouve également de la chlorexidine dans les gels utilisés pour introduire une sonde urinaire, la réaction est dans ce cas généralement plus lente. Il existe également des hypersensibilités immédiates ou retardées par contact transdermique lors de désinfection de plaie.
À retenir
- La tryptase est importante à doser, elle ne renseigne pas sur la cause de la réaction mais sur le mécanisme de celle-ci (allergique ou non allergique). Elle est à doser entre 30 et 90 minutes après la réaction. Le seuil classique de 11.4 est à abandonner car il existe une activation des mastocytes bien en dessous de ce seuil. Elle doit avant tout être comparée à la tryptase basale.
- La sévérité de la réaction, et la présence d’une activation des mastocytes ne renseignent pas sur l’agent causal.
- Le dosage du complément C4 est a réalisé en cas d’angioedème isolé.
- Il existe un questionnaire SARB (www. Sarb.be/site/assets/files/2012/ survey (sarb pdf) qu’il est important de compléter en cas de réaction dans le décours d’une anesthésie. Ce questionnaire permet d’établir une description de la réaction survenue afin de faciliter les tests allergologiques qui seront faits dans un second temps. Il répertorie également les différents centres d’Allergologie.
- Les réactions de grade 1 et 2 doivent aussi bénéficier d’un bilan notamment par des tests cutanés.
- Il faut abandonner les IgE spécifiques comme test unique pour établir un diagnostic (faible sensibilité, nombreux faux positifs).
- Il existe une double sensibilisation dans 5-7% des cas, il est donc important de tester tous les produits utilisés par l’anesthésiste mais aussi ceux utilisés lors de la chirurgie.
Dermatites de contact atypiques
Olivier Aerts
Pour chaque eczéma inexpliqué il faut réaliser des patch tests
Exemple 1
Le slime, nouveau jeu à la mode chez les enfants, est fabriqué à partir de détergents, de farine et de mousse à raser. Certains allergènes puissants s’y retrouvent comme les fragrances ou la méthylisothiazolinone. Ceux-ci occasionnent un eczéma palmaire qui peut être vésiculeux, voire vesiculo-bulleux. Des dermites irritatives sont également rapportées (Photo 1).
Exemple 2
Un eczéma résistant aux dermocorticoïdes dans un contexte de dermatite atopique doit faire l’objet de patch test afin d’exclure un eczéma de contact surajouté. Par exemple, une patiente souffrant depuis de nombreuses années de dermatite atopique présentait un eczéma persistant sur la face postérieure des cuisses malgré un traitement locale bien conduit. Des patch tests ont été effectués et ont mis en évidence une sensibilisation au bois de la planche des toilettes (Photo 2).
Exemple 3
L’eczéma de contact au nickel peut donner le change pour une gale, un eczéma papuleux en regard des ceintures ou des boutons de pantalon mais également des réactions à distance (-ide) (Photo 3).
Exemple 4
L’Acétophenone azine retrouvé dans les mousse EVA (éthylène vinyl acétate) des protèges tibia, des tongs, et de certaines chaussures, peut provoquer des eczémas d’allure atypique, hyperkératosiques et dyshidrosiques de la plante des pieds et de la face antérieure du tibia (Photo 4). Les tests cutanés s’effectuent avec des échantillons des protèges tibias. Il faut prévoir des échantillons de taille suffisante lors de la réalisation des tests à savoir au minimum de 5 x5 cm. Le nickel est également un allergène qui peut se présenter sous forme d’un eczéma hyperkératosique ou sous forme de callosités palmaires.
Exemple 5
La paraphénylène diamine (PPD), colorant azoïque présent notamment dans les teintures capillaires, les tatouages au henné noir ou les textiles de couleur foncée, peut provoquer des eczéma bulleux et œdèmes à ne pas confondre avec un angioedème. La photo 5 montre un exemple de réaction angioedémateuse lors de teintures capillaires à base de PPD (Photo 5).
Une allergie de contact peut compliquer d’autres dermatoses
Exemple 1
Un patient, atteint de psoriasis en plaques, présente au niveau du pouce une plaque de « psoriasis » résistante aux dermocorticoïdes. À la prise de sang, on retrouve une hyperéosinophilie. Des patchs tests sont effectués et mettent en évidence une sensibilisation aux thiurams, accélérateur de vulcanisation du caoutchouc (Photo 6). À l’anamnèse détaillée, le patient rapporte utiliser de manière très régulière un dé à coudre en caoutchouc dont la composition révèlera la présence de thiurams.
Allergie de contact : aussi non-eczématiforme
Exemple 1 : érythème polymorphe
Une patiente présente une lésion inflammatoire récidivante du menton, associée à une chéilite et une hyperpigmentation post-inflammatoire. À l’histologie, on retrouve des arguments en faveur d’un érythème polymorphe (vacuolopathie, kératinocytes nécrotiques et infiltrat lymphocytaire). Les allergies de contact qui se manifestent sous la forme d’érythème polymorphe sont souvent provoquées par des allergènes puissants. Dans le cas de cette patiente, il s’agit d’un eczéma de contact à sa flûte à bec contenant des bois tropicaux (l’allergène est une quinone, la primine) (Photo 7).
La réglisse, bois sucré doux, est également un allergène pouvant provoquer des dermatites de contact dont l’histologie évoque un érythème polymorphe. De même, le Pao ferro, un autre bois tropical, mais également l’huile de laurier et la propolis peuvent provoquer des dermatites de contact à type d’eczéma ou d’érythème polymorphe. Notons encore que l’oxyde de vitamine K, qui se retrouve dans les cosmétiques (Photo 8), la diphencyprone (Photo 9), utilisée dans le traitement des verrues vulgaires, ou encore le caoutchouc sont aussi des pourvoyeurs de dermatite de contact à type d’érythème polymorphe généralisé ou localisé.
Exemple 2 : éruptions lichénoïdes
Les réactions lichénoïdes de contact se manifestent essentiellement sur les muqueuses. Il s’agit de lésion unilatérale ou bilatérale des muqueuses buccales ou de la langue en regard d’une prothèse dentaire contenant des métaux. Les métaux les plus fréquemment en cause sont le nickel (appareils orthodontiques), le palladium, le chrome et le cobalt mais aussi le platine, le cuivre et le zinc (Photo 10). Les lésions disparaissent lorsque l’on ôte les prothèses.
Les allergies de contact aux méthacrylates également utilisés dans la fabrication de prothèse dentaire, peuvent se manifester sous forme d’ulcérations, de stomatites ou de réactions lichénoïdes. Les méthacrylates plus fréquemment mis en cause sont le méthyl méthacrylate (MMA), 2-hydroxyéthyl méthacrylate (2-HEMA), Bisphénol A-glycidyl méthacrylate (Bis-GMA) (Photo 11). Pour éviter les faux négatifs, les méthacrylates utilisés pour la réalisation des patchs tests doivent être conservés au frigo car ils sont très volatiles. Une lecture tardive après 7 jours doit également être effectuée. La méthyisothiazolinone, utilisée comme agent conservateur dans certains savons, peut elle aussi donner des réactions lichénoïdes des muqueuses. Des cas d’allergie de contact d’allure lichénoïdes des muqueuses buccales ont été rapportées suite au port de prothèses dentaires nettoyées avec du savon vaisselle contenant cet allergène.
Exemple 3 : hyperpigmentation
Les fragrances, le nickel et les colorants azoïques sont pourvoyeurs de dermatite de contact avec hyperpigmentation ou d’allergie de contact à type de lichen pigmenté. Ceci s’observe essentiellement chez les patients de phototype foncé (Photos 12 et 13).
Exemple 4 : dépigmentation, leucodermie, vitiligo de contact
La résine paratertiaire butylphénol formaldéhyde (R-PTBPF) utilisé dans l’assemblage des cuirs, peut également provoquer un eczéma de contact avec une dépigmentation résiduelle (Photo 14).
Notons encore que les dérivés de catéchol et phénol (retrouvé notamment dans le silicone des lunettes de piscine), la PPD (contenu dans les colorants pour les cheveux ou la barbe), et les thiourées (contenu dans la bande élastique de CPAP) peuvent provoquer des allergies contacts avec dépigmentations (Photo 15). Rappelons également que des pelades sont décrites au décours d’allergie de contact à la PPD.
Exemple 5 : purpura
Les patch tests au cobalt donne souvent une lecture purpurique, mais celle-ci doit être considérée comme irritative.
Des allergies de contact aux colorants vestimentaires peuvent prendre l’aspect clinique et histologique de capillarite purpurique. Les tests cutanés doivent être réalisés avec les colorants contenus dans la batterie standard européenne ainsi qu’avec des morceaux des textiles portés (pour la réalisation des tests, il est conseillé de tremper le textile dans de l’acétone éthanol et de l’eau) ce qui permet de concentrer l’allergène.
Le Dimethyldithiocarbamylbenzothiazole sulfide (DMTBS), dérivé du caoutchouc que l’on retrouve dans les chaussures notamment, peut également provoquer des réactions de contact purpuriques des pieds mimant une acrocyanose (Photo 16).
Exemple 6 : réactions lymphomatoïdes
Les pseudolymphomes et des dermatites de contact lymphomatoïdes B sont décrits lors de contacts avec le diméthyl fumarate (anti-moississure retrouvé notamment dans des canapés), la méthyisothiazolinone et la chlorométhylisothiazolinone.
À l’histologie des eczémas de contact lymphomatoïdes, on retrouve principalement un infiltrat de lymphoctytes T et d’éosinophiles. La présence de ces derniers doit donc orienter le diagnostic et faire suspecter une allergie de contact. Les patients ayant un pseudolymphome doivent être suivi car l’évolution vers un lymphome vrai existe.
Exemple 7: lésions pustuleuses
Les métaux provoquent des réactions pustuleuses par irritation chez les patients atopiques. Les fragrances, les biguanides et les médicaments comme le diltiazem, ou encore les antibiotiques topiques (clindamycine) peuvent provoquer des allergies de contact d’allure pustuleuse voire même des PEAG (pustuloses exanthématiques aigues généralisées). Il existe des contacts allergiques pouvant aggraver un psoriasis pustuleux palmoplantaires, notamment aux métaux, caouthcoucs (thiuram, carbamates) et aux fragrances. La PPD et certains compléments alimentaires peuvent déclencher par allergie de contact un syndrome de Sweet-like d’allure pustuleuse ou varioliforme (Photo 17). Cliniquement, on peut retrouver des plaques érythémateuses infiltrées dermiques et hypodermiques bien délimitées, pustuleuses, évoluant de manière centrifuge, accompagnées de symptômes généraux, arthralgie, fièvre et altération de l’état général. À l’histologie, on retrouve un infiltrat neutrophilique mais également éosinophilique.
Exemple 8 : lésions granulomateuses
Les métaux comme le palladium que l’on retouve dans les prothèses dentaires, dans les bijoux (piercings, boucles d’oreilles) et dans les pace-makers peuvent donner des réactions de contact allergique granulomateuses.
L’aluminium contenu dans certains vaccins peut provoquer des granulomes au site d’injection. Il s’agit d’une allergie de contact transitoire qui peut disparaitre en quelques années. Ces réactions ne sont pas une contre-indication à la vaccination. Pour éviter ce type de réaction, la vaccination peut être réalisée plus profondément en intramusculaire. L’allergie de contact à l’aluminium contenu dans les vaccins peut également se manifester sous la forme d’une pseudocellulite.
Les poly-méthylmethacrylates (PMMA), injectés dans les fesses, les lèvres pour leur donner un aspect rebondi ou pulpeux, provoquent des réactions allergiques retardées granulomateuses difficiles à traiter.
Exemple 9 : éruptions généralisées
Les dermatites de contact systémiques se présentent sous forme d’éruptions accompagnées de fièvre, de plaintes systémiques comme des troubles respiratoires, conjonctivite, atteinte des muqueuses etc. La sensibilisation se fait par voie cutanée et l’élicitation par voie systémique (re-exposition orale, intra-veineux, intra-musculaire, ou par voie d’inhalation à l’allergène auquel le patient s’est sensibilisé par voie cutanée) . Ce type de réaction est dose dépendante. Trois formes principales de réactions induites par exposition systémiques à un allergène de contact sont décrites: éruption généralisée, atteinte des grands plis (Babouin) et atteinte palmoplantaire à type de dyshidrose.
Éruptions généralisées
Un exemple connu, est celui d’un enfant ayant avalé une pièce de monnaie et qui développe une éruption maculopapuleuse généralisée, associée à de la fièvre et une altération de l’état général. Il s’agit d’une éruption généralisée sur le nickel contenu dans la pièce de monnaie ingérée. Nickel également retrouvé dans le stérilet Essure®, provoquant le même tableau clinique d’éruption eczématiforme généralisée chez les patientes sensibilisées.
Atteinte des plis ou syndrome de Babouin
L’atteinte des grands plis ou syndrome de Babouin est une dermite de contact systémique après sensibilisation par contact cutané. Il peut être provoqué par des métaux comme le nickel, la phénoxyméthylpénicilline, l’ampicilline, la cimétidine, l’hydroxyurée, la pseudoéphédrine, l’aminophylline, le mercure et l’héparine. Le syndrome de Babouin est à ne pas confondre avec le SDRIFE qui atteint également les grands plis mais survient par exposition systémique à l’allergène sans contact préalable. Le Diltiazem, les compléments alimentaires, les probiotiques en sont des pourvoyeurs (Photo 18).
Dishydrose palmo-plantaire
Devant une dyshidrose palmoplantaire sévère ou résistant au traitement, penser au allergies de contact par voie systémique, exemple le cobalt contenu dans le Befact forte ou l’exposition systémique au nickel contenu dans les aliments notamment. (Photo 19)
Conclusion
- L’allergie de contact, ce n’est pas que l’ECZÉMA de contact typique, mais un grande variété de tableaux cliniques allant d’une résistance inhabituelle au traitement à des éruptions mimant d’autres dermatoses.
- Pour chaque eczéma inexpliqué ou ne répondant pas à un traitement bien conduit, il est important de bien détailler l’anamnèse et de penser à réaliser des patch tests.
- Les allergènes de contact ne cessent d’évoluer et changer notamment au gré de la législation ou des phénomènes de mode. Un interrogatoire minutieux et des tests cutanés avec des batteries spécifiques mais surtout avec tous les produits manipulés ou utilisés par le patient est indispensable.
Références
1.Berroa F, Lafuente A, Javaloyes G, Cabrera-Freitag P, de la Borbolla JM, Moncada R et al. The Incidence of Perioperative Hypersensitivity Reactions: A Single - Center, Prospective, Cohort Study. Anesth Analg. 2015;121: 117 - 23.
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2.Leysen J, Bridts CH, De Clerck LS, Vercauteren M, Lambert J, Weyler JJ, Stevens WJ, Ebo DG. Allergy to rocuronium: from clinical suspicion to correct diagnosis. Allergy. 2011; 66: 1014–1019.
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3.Leysen J, Uyttebroek A, Sabato V, Bridts CH, De Clerck LS, Ebo DG. Predictive value of allergy tests for neuromuscular blocking agents: tackling an unmet need. Clin Exp Allergy. 2014 Aug;44 (8):1069-75.
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Affiliations
1 Departement of Dermatology, Université Catholique de Louvain, Cliniques universitaires Saint-Luc, Brussels, Belgium
2 Department of Dermatology, Universitair Ziekenhuis Antwerp, Antwerp, Belgium
3 Departement of Dermatology, Grand hôpital de Charleroi, Charleroi, Belgium
4 Department of Immunology, Allergology, Rheumatology, Universitair Ziekenhuis Antwerp, Antwerp, Belgium