Introduction
L’accident vasculaire cérébral (AVC) est la deuxième cause de décès et la troisième cause de handicap dans le monde chez les adultes. L’incidence des AVC augmente avec l’âge. La proportion des AVC chez les plus jeunes générations est en augmentation. Le taux d’AVC chez les individus de 55 ans et moins a augmenté de 13 % dans les années 1990 à 18.6% en 2005 (1). Entre 20 et 30 % des accidents vasculaires cérébraux se déclarent chez les patients de moins de 65 ans (2). Cette situation est préoccupante car il s’agit de personnes de prime abord en bonne santé et actives sur le plan sexuel, qui peuvent vraisemblablement être victimes des différentes conséquences d’un AVC (3).
L’incidence annuelle belge par 100 000 habitants a été estimée à 185 pour les AVC et 93 pour les AIT, sans différence significative entre les femmes et les hommes. On compterait chaque année en Belgique 18 875 habitants touchés par un AVC (4). Par ailleurs, en 2017, les accidents vasculaires cérébraux étaient la cause de 7,56 % des décès en Belgique (hommes et femmes confondus) (5).
Un accident vasculaire cérébral peut avoir des conséquences sur diverses fonctions comme le langage, la vue, la compréhension, la mémoire, la force musculaire, la coordination ou encore l’équilibre. Une prise en charge multidisciplinaire est la norme.
Les séquelles d’un accident vasculaire cérébral entrainent des degrés variables de déficiences et handicaps, parfois faibles jusque sévères. La prise en charge des séquelles physiques et psychologiques après un accident vasculaire cérébral est largement documentée. Cependant, peu de recherches ont été consacrées à l’impact d’un accident vasculaire cérébral sur la sexualité.
La sexualité fait partie intégrante du fonctionnement des hommes et des femmes de tous les âges, et elle est pourtant ignorée ou très peu discutée dans le processus de réadaptation. Cela est particulièrement vrai pour les survivants d’un AVC qui sont plus âgés et qui présentent une plus grande déficience fonctionnelle. Or, nous savons maintenant que les survivants d’un AVC présentent une diminution de l’activité sexuelle et une augmentation de la dysfonction sexuelle (6).
L’objectif principal de la rééducation est de permettre au patient de retrouver son autonomie en coordonnant tous les moyens nécessaires visant à prévenir ou bien réduire au minimum les conséquences fonctionnelles, physiques, psychologiques, sociales et économiques des déficiences et des incapacités (7). Il a donc paru légitime de réaliser ce travail sur AVC et sexualité.
Objectif
L’objectif de cette revue de la littérature est de mettre en avant l’état des connaissances autour de la sexualité et la fonction sexuelle chez les patients, adultes de plus de 18 ans, après un accident vasculaire cérébral ; d’explorer les associations entre ces changements dans la sexualité et les facteurs cliniques, anatomiques, et psychosociaux ; ainsi que lister les différentes pistes de réadaptation sexuelle existantes.
Méthode de la recherche bibliographique
Les articles pertinents ont été identifiés en utilisant la base de données Pubmed (depuis son instauration jusque 2019) avec les mots clés suivants : « sexuality after stroke ». Après la lecture du titre et de l’abstract, nous avons sélectionné les études relatives aux dysfonctions sexuelles chez des patients après un AVC. Afin d’optimiser le nombre et la qualité des articles sélectionnés sur le sujet, la sélection du type d’article (« review » et « clinical trial ») a été utilisée. Une recherche additionnelle a également été menée sur Pubmed avec les combinaisons suivantes : « stroke AND sexuality » et « stroke AND sexuality AND rehabilitation ». Des articles additionnels ont été identifiés via les listes de références des articles précédemment identifiés dans cette base de données. Critères d’inclusion : seules les études menées sur les humains ont été retenues. Les études publiées en français ou en anglais, les études qualitatives ainsi que les études de cohortes ont également été retenues. Critères d’exclusion : les études expérimentales et sur animal n’ont pas été recherchées. Les études de type « case report », les opinions d’experts ou encore les lettres à l’éditeur n’ont pas été retenues. Nous n’avons pas sélectionné les études publiées dans une autre langue que le français ou l’anglais.
La 5ième édition du Braddom’s physical medicine and rehabilitation a été consultée.
Résultats quantitatifs de la revue de la littérature
Nous avons sélectionné 26 articles à l’issue de cette recherche bibliographique. Parmi ces 26 articles, il y avait 8 revues de littérature (dont une revue d’articles qualitatifs uniquement), 2 revues narratives, 3 études de cohortes, 2 études cas-contrôle, 4 études « cross-sectionnal », 6 études qualitatives et une étude randomisée contrôlée en simple aveugle. Une étude s’intéressait uniquement aux femmes victimes d’un AVC et une autre étude s’intéressait uniquement aux hommes victimes d’un AVC, toutes les autres études s’intéressaient aux deux genres.
Analyse qualitative de la Revue de la littérature
La dysfonction sexuelle : définition
La dysfonction sexuelle est une des déficiences de l’AVC la plus sous-estimée et la plus sous-évaluée. Sur le plan clinique, la dysfonction sexuelle comprend une diminution de la libido, une difficulté et/ou une incapacité à éjaculer, une difficulté et une incapacité à avoir une érection, un manque ou une absence de lubrification vaginale ou encore une dysfonction orgasmique. La littérature disponible sur ce sujet suggère une prévalence assez large entre 20 à 75 % (8). De nombreuses études ont été menées pour tenter de comprendre comment un accident vasculaire cérébral pouvait impacter la sexualité de ces patients. Toutes les études ont exploré les modifications de la sexualité au sein de populations hétérosexuelles.
Les localisations neuro-anatomiques et la dysfonction sexuelle
Les différentes études menées n’ont pas permis d’établir un consensus sur les conséquences directes d’un AVC sur la fonction sexuelle en fonction de la latéralité et la localisation de l’accident vasculaire cérébral. Cependant, certaines d’entre elles se sont concentrées sur l’association éventuelle entre la dysfonction sexuelle et certaines localisations de lésion cérébrale. Le thalamus particulièrement pourrait jouer un rôle dans l’érection pénienne et la sexualité plus généralement. Durant l’excitation sexuelle, l’érection pénienne induite par l’ocytocine, est médiée par un influx de calcium dans les neurones ocytocinergiques dans le noyau paraventriculaire (NPV) de l’hypothalamus. Le NPV est considéré comme le point cardinal entre le système nerveux autonome central et périphérique. L’ocytocine active également les neurones dopaminergiques du système mésolimbique qui est impliqué dans la fonction érectile (8).
L’hémisphère droit semblerait avoir un rôle dominant dans la libido et la fonction érectile. Certaines études neuro-anatomique fonctionnelles démontrent une augmentation du flux sanguin cérébral dans l’hémisphère droit lors de différentes étapes de performance sexuelle, mesuré au PET-scan, après une stimulation sexuelle du pénis. Les lésions pariétales droites entrainent fréquemment une négligence de l’hémicorps gauche. Ces patients répondraient difficilement aux sensations érotiques à cause de l’héminégligence sensorielle et spatiale ainsi qu’à cause des troubles sensitifs (8). À notre connaissance, la littérature ne dispose pas d’études s’intéressant au lien entre les patients droitiers ou gauchers ayant présenté un AVC et la dysfonction sexuelle post-AVC.
L’hypo sexualité survient plus fréquemment lors d’un accident vasculaire cérébral. Cependant, l’hypersexualité est également décrite, particulièrement lors d’une lésion du lobe temporal, un infarctus subthalamique ou un infarctus thalamique bilatéral. Les structures fronto-limbiques auraient un rôle important dans le comportement sexuel. L’hypersexualité serait le résultat d’une réaction hypermétabolique dans le système limbique frontal (8).
Les profils de dysfonction sexuelle : différences et similitudes entre les hommes et les femmes
La dysfonction sexuelle est une constatation courante chez l’homme et la femme après un AVC. La dysfonction érectile et éjaculatoire sont les manifestations cliniques les plus fréquentes chez les hommes. D’après la revue de littérature de Grenier-Genest, les taux de dysfonction érectile varient entre 28 % et 75 % selon les échantillons étudiés ; les taux de dysfonction éjaculatoire varient entre 64,5% et 70 % selon les études (3).
Les femmes expérimentent le plus souvent une dysfonction orgasmique et des difficultés de lubrifications. Suivant les études et les échantillons évalués, les taux de dysfonction orgasmique peuvent atteindre 77,5%, ainsi que le manque de lubrification vaginale varie de 50 % à 77 % (3).
Une diminution significative de la fréquence de l’activité sexuelle est observée chez les deux sexes récupérant d’un AVC. Entre 14% et 50% des patients arrêtent toutes activités sexuelles pendant les trois premiers mois post-AVC, correspondant à la période d’hospitalisation (9). Certains survivants décrivent n’avoir aucune activité sexuelle quelle qu’elle soit jusqu’à un an après l’accident vasculaire cérébral (10).
La littérature dépeint une baisse globale de la satisfaction sexuelle après un AVC chez les deux genres (9).
Les facteurs ayant un impact sur la sexualité après un AVC
Un accident vasculaire cérébral, en fonction du territoire touché par la lésion cérébrale, peut causer un déficit moteur (hémiparésie ou hémiplégie), un déficit sensitif, une héminégligence, une aphasie, une hémianopsie, une atteinte des nerfs crâniens, etc.…
Le déficit moteur, la spasticité ou encore la douleur sont des barrières physiques à l’intimité et l’activité sexuelle. Les troubles sensitifs font également partie des conséquences d’un AVC qui représentent un frein à une intimité. Ces patients se retrouvent moins enclins à répondre à une stimulation érotique du coté touché. Ces troubles entrainent un moindre confort et des difficultés de positionnement du patient, le rendant moins enclin à embrasser, stimuler ou encore initier une relation sexuelle (9).
La dépendance aux activités de la vie quotidienne (AVQ) est significativement associée au niveau d’activité sexuelle. La diminution de la fréquence des rapports sexuels est positivement corrélée au degré du handicap physique et au niveau de dépendance dans les AVQ (11). En outre, certaines études, s’intéressant aux patients post-AVC avec un faible handicap voire pas de handicap séquellaire (mRS entre 0 et 2), ont montré une baisse significative de l’activité sexuelle chez ces personnes (12,13). Cela suggère que les facteurs contribuant à des difficultés dans le domaine de la sexualité et de l’intimité après un AVC sont le plus probablement multifactorielles (9). L’échelle modifiée de Rankin, parmi d’autres, est utilisé afin d’évaluer le niveau d’indépendance fonctionnelle des patients en fonction des activités de la vie quotidienne par rapport à avant l’AVC.
L’incontinence urinaire est une complication très gênante pouvant se déclarer après un accident vasculaire cérébral. L’hyperactivité détrusorienne et l’incontinence par impériosité sont les causes les plus fréquentes d’incontinence urinaire après un AVC, provoquées par une perturbation directe des processus neuro-mictionnels qui mènent à l’inhibition de la contraction vésicale. La prévalence oscille entre 37 et 90 % selon les études. L’hypoactivité déstrusorienne à la suite d’un AVC a également été décrite et oscille entre 21 à 35 % selon les études. Ce type d’incontinence se déclarerait à la suite d’un AVC aigu à cause d’une perte initiale du tonus vésical (14). L’existence d’une vessie neurogène hyperactive est corrélée à un âge avancé, au sexe masculin et à un score plus élevé de l’échelle modifiée de Rankin (mRS) (15). La vessie neurogène hyperactive chez les hommes semble être significativement associée à une augmentation de la prévalence de la dysfonction érectile, réduisant l’activité sexuelle ainsi que la satisfaction sexuelle à cause des symptômes urinaires (16).
Les facteurs psychologiques contribuent à l’étiologie de la dysfonction sexuelle après un accident vasculaire cérébral. La dépression est fréquemment observée chez les survivants d’un AVC. La dysfonction érectile post-AVC est corrélée à la sévérité des symptômes de la dépression tant chez l’homme que chez la femme (17,18).
L’étude de Lever et Prior, qui s’intéresse uniquement à la sexualité des patientes victimes d’un AVC, met en avant que les séquelles secondaires à l’AVC peuvent toucher à l’image corporelle, et représenter un facteur psychologique sous-jacent à la dysfonction sexuelle. Les limitations physiques séquellaires sont vécues par les patientes comme une atteinte à « l’image de soi » et à une perte d’identité (19).
Les patients victimes d’un accident vasculaire cérébral présentent souvent des comorbidités, tel que l’hypertension artérielle ou encore le diabète, qui influencent la fonction sexuelle chez ces patients. La dysfonction sexuelle augmente parmi les patients présentant d’autres problèmes de santé au préalable (8,9).
Les médicaments prescrits pour gérer les comorbidités d’un accident vasculaire cérébral, contribuent vraisemblablement à la dysfonction sexuelle post-AVC de ces patients. Beaucoup d’agents antihypertenseurs peuvent inhiber les érections en diminuant la pression artérielle caverneuse de manière concomitante. Certains d’entre eux, comme les bétabloquants, peuvent diminuer le désir sexuel. Les antidépresseurs agissent sur la plasticité cérébrale et améliorent la récupération post-AVC et ils sont dès lors largement prescrits. La dysfonction sexuelle est néanmoins un effet secondaire possible connu des antidépresseurs et plus particulièrement des inhibiteurs sélectifs de la recapture de sérotonine (8,20). Les antipsychotiques peuvent influencer les taux de prolactine et dès lors influencer la fonction sexuelle (8,21).
La plupart des partenaires, ne recevant aucune information concernant la sexualité après un accident vasculaire cérébral, suppose que l’activité sexuelle n’est pas encouragée (6). Les partenaires sont déstabilisés car leur rôle au sein de la relation change, surtout quand ils passent de l’état de partenaire intime à celui du soignant. Ce changement de rôle est particulièrement frappant chez les partenaires femmes des survivants d’un AVC. Les partenaires expriment un sentiment de frustration et de désespoir sur leur vie future (22). Une étude récente menée par Fugl-Meyer rapporte que les épouses des survivants d’AVC se disent satisfaite dans leur vie de famille et leur relation avec leur mari pour 80 % d’entre-elles un an après l’AVC, le pourcentage de satisfaction diminuent autour des 50 % à 6 ans après l’AVC. Cette même étude montre également que moins de 33 % des épouses se disent satisfaite dans leur vie sexuelle à un an et à 6 ans après l’AVC de leur partenaire (23).
La réadaptation sexuelle
Les recommandations cliniques pour la prise en charge des accidents vasculaires cérébraux publiés en 2017 par la « Stroke Foundation » stipulent que les patients survivants d’un AVC et leurs partenaires devraient avoir l’opportunité d’aborder le sujet de l’intimité sexuelle avec un professionnel de la santé compétent ; et pouvoir recevoir des informations écrites concernant l’intimité, la sexualité et la dysfonction sexuelle après un AVC (24). En effet, la sexualité devrait être abordée dans le cadre d’une approche centrée sur la personne dans le processus de rééducation. Cela n’est malheureusement pas toujours le cas.
La trajectoire naturelle de la récupération de la dysfonction sexuelle n’est pas bien documentée, ne permettant pas de déterminer un pronostic précis (8).
La littérature indique plusieurs barrières freinant la rééducation sexuelle dans les établissements de soins : le manque de formation des équipes sur le sujet, l’inconfort de l’équipe à aborder le thème de la sexualité, qui est exacerbé par le manque de connaissances des équipes sur le sujet, le manque de ressources, ou encore la peur d’embarrasser le (la) patient (e). Il y a un tabou autour de la sexualité empêchant d’aborder ce sujet au même titre qu’un autre. Beaucoup de professionnels de la santé considèrent que c’est au patient de poser la question s’il en ressent le besoin car il s’agit de questions privées (7,25). Cet inconfort à aborder le sujet est partagé par les patients eux-mêmes qui craignent d’être jugés par leurs préoccupations ; de plus ils ne savent pas vers qui se tourner pour adresser leurs questions. L’aphasie peut également être une barrière empêchant les patients de partager leurs inquiétudes au sujet de la sexualité post-AVC.
Les patients craignent également d’aborder le sujet avec leur partenaire de peur d’être rejeté ou encore de les surcharger ; car en effet dans certaines situations, le partenaire endosse souvent le rôle d’aide-soignant / d’aidant (7).
Les aspects culturels peuvent également influencer la perception de la sexualité. L’organisation Mondiale de la Santé confirme que la manière dont la santé sexuelle est abordée dans différents pays est largement déterminée par la culture, liée à la construction de genre et de religion, le tout renforcé par la politique (26).
Selon Stein et al., 81 % des patients rapportent avoir reçu des informations insuffisantes au sujet de la sexualité post-AVC ; 60 % d’entre ces patients expriment préférer recevoir ces conseils sur l’intimité et la sexualité par un médecin. 26.5 % auraient aimé recevoir ces conseils après la sortie de l’hospitalisation (27). Les patients aimeraient recevoir les informations sur la sexualité via différentes sources : des brochures, des DVD ou encore directement via un professionnel de la santé. Selon Prior et al., 30 % des patients participant au questionnaire de l’étude voulaient recevoir des informations relatives à la sexualité après l’AVC mais seulement 8,2 % d’entre eux ont reçu les informations. Par ailleurs, les participants préféraient recevoir ces informations par un médecin dans une conversation privé en la présence ou non de leur partenaire (28).
Le moment choisi pour aborder la question de la sexualité est également délicat. Généralement, les patients ne désirent pas recevoir les informations concernant la sexualité dans la phase aiguë de la revalidation car leur attention est centrée sur leur survie et leur récupération motrice lors de la phase aiguë (6). Rosenbaum et al. proposent d’aborder la sujet directement après la sortie de l’hospitalisation (9). Stein et al. indiquent que le moment opportun va dépendre d’une personne à l’autre et dès lors une stratégie individualisée serait préconisée (27). Même si le moment approprié reste un point encore débattu, la littérature s’accorde sur l’importance de pouvoir fournir un minimum d’information sur la sexualité et la santé sexuelle aux patients victimes d’un AVC durant le processus de réhabilitation (3).
Les programmes d’intervention existants
Il existe différents programmes de réadaptation sexuelle créés pour aider les professionnels de la santé à aborder et évaluer la sexualité de patients souffrant de diverses pathologies, y compris neurologiques. Ces programmes offrent aux professionnels de la santé une structure systématique pour intégrer la sexualité dans les processus de réadaptation sexuelle.
Le modèle PLISSIT (Permission, Limited Information, Specific Suggestion, and Intensive Therapy), développé dans les années 1970 par Annon, propose une structure de travail pour les professionnels de la santé comprenant 4 étapes : premièrement, l’opportunité de parler de la sexualité au sein de la réadaptation est proposé au patient par les soignants eux-mêmes ; deuxièmement, des informations en petite quantité sont fournies au sujet de l’impact de leur affection neurologique sur leur fonction sexuelle ; troisièmement, des suggestions spécifiques peuvent être proposées aux patients concernant la gestion des difficultés rencontrées lors de la sexualité et dans l’intimité ; et finalement, les professionnels de la santé peuvent référer les patients à des services appropriés si les troubles sont conséquents et sévères (3,29).
Le modèle Ex-PLISSIT, proposé en 2006 par Davis & Tailor, contrairement au modèle précédent, encourage les professionnels de la santé à s’assurer que les informations concernant la sexualité et la réadaptation sexuelle ont bien été comprises et intégrées lors de chaque étape (3).
Le modèle BETTER (Bring the topic, Explain concerns, Tell about resources, Timing, Educate, and Record), proposé en 2013 par Steinke et al., suit les même principes généraux tout en ajoutant les informations fournies au patient dans leur dossier médical afin d’assurer un suivi optimal (3).
Un modèle alternatif en 5 étapes a également été proposé par Song et al., en 2011 : premièrement, les informations concernant l’impact de l’affection neurologique sur la sexualité du patient sont fournies ; deuxièmement, les informations générale sur la santé sexuelle sont également fournies ; troisièmement, les préoccupations spécifiques liés à l’AVC sont abordées ; quatrièmement, des suggestions et stratégies sont proposées aux patients pour gérer leur dysfonction sexuelle ; et finalement des questions pour s’assurer que les informations ont bien été intégrées doivent être posées. Ce dernier modèle semble prometteur avec des résultats démontrant une augmentation de la fréquence des rapports sexuels et de la satisfaction sexuelle un mois après le programme (3,29). Ces différents modèles soulignent l’importance pour les professionnels de la santé d’identifier et d’aborder ce sujet de la sexualité avec leurs patients.
Afin d’optimiser la rétention d’information, les professionnels de la santé sont encouragés à utiliser des ressources multi-média comme les présentations PowerPoint, des pamphlets, des vidéos, etc. Les patients semblent préférer recevoir les informations durant un entretien individuel que lors d’une session de groupe (3).
Conclusions
Cette analyse de la littérature met en évidence la prévalence élevée de la dysfonction sexuelle après un AVC. Les dysfonctions sexuelles qui touchent autant les hommes que les femmes sont représentées par une diminution de l’activité sexuelle, de la satisfaction sexuelle et de la libido. Il n’y a pas de lien clair établi entre les caractéristiques d’un AVC et la dysfonction sexuelle. Les comorbidités, la médication et les facteurs psychologiques doivent être pris sérieusement en considération car ils ont un impact sur la vie sexuelle des patients victimes d’un AVC. Étant donné la complexité de l’impact de l’AVC, la diversité des problèmes sexuels, ainsi que la diversité des séquelles, une expertise en équipe pluridisciplinaire devrait être disponible ainsi qu’une optimisation des formations des professionnels de la santé en regard de la sexualité.
Recommandations pratiques
- Les dysfonctions sexuelles après un AVC sont fréquentes et doivent être abordées
- La réadaptation sexuelle devrait faire partie intégrante des objectifs de la prise en charge des patients victimes d’un AVC
- Les comorbidités, le traitement médicamenteux, les facteurs psychologiques et les facteurs cliniques doivent être systématiquement pris en considération lors de la réadaptation sexuelle
Affiliations
1. Département de Médecine physique et réadaptation, Centre hospitalier universitaire Brugmann, site Horta, Université Libre de Bruxelles
2. Département de Médecine Physique et Réadaptation, CHU Brugmann, site Reine Astrid
3. Département de Neurologie, Centre hospitalier universitaire Brugmann, Université Libre de Bruxelles
Correspondance
Dr. Morgane Chalon
CHU Brugmann, site Horta
Place Arthur Van Gehuchten 4
B-1020 Bruxelles
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