Le Cri Edvard Munch

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Chantal Daumerie Publié dans la revue de : Octobre 2020 Rubrique(s) : Ama Contacts
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Résumé de l'article :

Face à la CRIse sanitaire qui nous submerge, le sentiment d’effroi qui nous accable - légitime ou non - peut trouver dans le célèbre tableau d’Edvard Munch, une résonance prophétique.

Article complet :

Face à la CRIse sanitaire qui nous submerge, le sentiment d’effroi qui nous accable - légitime ou non - peut trouver dans le célèbre tableau d’Edvard Munch, une résonance prophétique.

Mais que représente le CRI ?

Pour tenter de comprendre l’œuvre, référons-nous à la vie de l’artiste.

Munch naît en 1863 au Nord de Oslo à Loten dans une modeste ferme. Il est le deuxième d’une famille de cinq enfants. Son père est médecin militaire. Dès son plus jeune âge, Edvard est confronté à la maladie et à la mort ; sa mère et une de ses sœurs sont en effet emportées par la tuberculose, source de ravages de nos jours oubliés.

Ces événements tragiques de son enfance sont à l‘origine de sa tendance à la dépression et de sa vision très pessimiste de notre condition.

La maladie poursuit Munch et l’idée de mort n’aura de cesse de le hanter, fantôme inexorable. À 30 ans, il devient l’artiste le plus controversé d’Europe du Nord.

Durant la période Nazi, les travaux de Munch sont étiquetés comme étant de l’art dégénéré et 82 œuvres sont retirées des musées allemands pour être vendues en Norvège. Ceci blesse notre auteur, antifasciste notoire, qui aurait aimé l’Allemagne comme un second pays. Il se retire en Norvège et décède en 1944 de la grippe espagnole.

Il est aujourd‘hui considéré comme un grand maître de l’Art moderne, et précurseur de l’expressionnisme, cette mouvance artistique qui vise à la projection d’une subjectivité déformant le réel pour engendrer une réaction émotionnelle chez le spectateur.

Le choix de couleurs violentes, de lignes acérées participe à l’intention agressive de l’auteur soucieux de susciter au minimum une réaction, au mieux une réflexion.

Notre auteur est mondialement connu pour son œuvre le Cri (Skrik en Norvégien), un des tableaux clés dans l’histoire de la peinture, justifiant (ou non) le fait qu’il fut vendu par Sotheby’s pour 120 millions de dollars, record de vente aux enchères…

Cette œuvre peinte à la tempera sur carton est en fait une version de 5 œuvres ( 2 peintures,1 pastel, 1 au crayon et 1 lithographie) réalisées entre 1893 et 1917.

Le Cri représente une figure humanoïde avec une expression horrifiée, fixant le spectateur depuis un pont surplombant des eaux grises, avec un grand ciel orange s’étalant autour de lui. Le paysage en arrière-plan est le fjord d’Oslo, vu d’Ekerberg. Pourquoi crie- t -il ? De quoi a-t-il peur ? Ce cri cache beaucoup de secrets.

En ces temps troublés, il n’est pas difficile d’y voir l’effroi glacial, mortifère, face à l’impuissance de l’Homme devant une nature impressionnante et dérangeante. Des visages actuels, pathétiques, nous invitant à prendre davantage la nature en considération peuvent s’y retrouver. Ce qui fut qualifié de « fantasmagorique » à l’époque se dote de nos jours de traits de plus en plus réels.

Pour certains, cette figure effrayée ne serait que Munch lui-même qui, en effet, explique qu’il a vécu une hallucination visuelle et auditive, traumatisme qui ne pouvait rester sans traduction artistique.

D’autres disent que c’est l’image de la personnalité tortueuse de Munch. Il habitait à côté de l’hôpital psychiatrique où une de ses sœurs était internée et ce cri serait perçu comme son anxiété et sa terreur face à ses problèmes personnels.

Des astrophysiciens américains avancent une explication scientifique. Le 27 aout 1883, en Indonésie, le volcan Krakatoa subit une éruption et le bruit de plus de 172 décibels retentit à plus de 4800 Kms. Le personnage ne se prendrait pas la tête dans les mains mais se bouche les oreilles en raison du bruit assourdissant du volcan.Des cendres volcaniques se répandent un peu partout et notamment au Nord de l’Europe. Elles seraient à l’origine de couchers de soleils flamboyants dont Munch fut le témoin.

Le personnage central, dépourvu de cheveux, au visage émacié, inhumain ressemble curieusement à une momie du peuple péruvien Chachapoya, momies exposées en 1889 lors de l’exposition universelle à Paris où habitait cette année-là Munch. Munch s’en serait inspiré, comme d’ailleurs Gauguin. Universalité de la crainte de la mort.

Deux personnages se cachent dans la toile, distants … Selon Munch, ce sont deux de ses amis qui l’accompagnaient lors d’une promenade au cours de laquelle il fut saisi, horrifié, par la force de la nature, lui ayant arraché un cri. Trois personnages sur la toile à l’instar des trois manières d’envisager la mort : la mort au niveau du « il », la mort au niveau du « tu » et la mort du « je ».

Le Cri de Munch, reflet de toute angoisse existentielle, a inspiré d’autres formes d’art comme le cinéma (par exemple un épisode de la série « la casa de Papel », où les braqueurs possèdent un masque s’inspirant du tableau). Dans la série américaine « les Simpsons », le tableau est montré à plusieurs reprises. Le Cri se retrouve dans des séries d’animation japonaises, des bandes dessinées comme celle de l’anniversaire d’Astérix et Obélix où le tableau est parodié par Uderzo. S’en emparent des jeux vidéo et même l’informatique comme le montre cet Emoij que vous avez sans doute déjà utilisé sans savoir d’où il venait.